Abraham de Brooklyn est un des romans de jeunesse de Didier Decoin, qui l’a écrit entre 1969 et 1970. L’écrivain a déjà un bon syle descriptif à l’ancienne, pour situer les personnages et caractériser les lieux américains traversés. Son histoire, par contre, va dans plusieurs directions. La première serait sociologique pour décrire la situation des immigrés en Amérique à travers la construction du pont de Brooklyn en toile de fond. La deuxième, c’est de choisir la destinée d’un ménage à trois formé par Simon, Mina et Kate, aux variations particulières où fleurent l’attraction, la répulsion, la provocation et la jalousie.. Et puis, il y a l’aspect religieux du livre où des références bibliques se déploient car Simon est catholique et voudrait voir s’éclairer ce qui se passe dans son existence chaotique à travers des épisodes des Saintes Écritures. C’est très ambitieux pour un roman de jeune écrivain, pas encore rôdé complètement au retentissement globale d’une histoire. Pourtant, Abraham de Brooklyn se lit bien, délivre de subtiles atmosphères de liberté dans une Amérique qui n’est qu’un jeune pays où tout reste à faire. Ce qui demeure,à mon sens,un brin incomplet, c’est l’épilogue des relations entre Kate, Simon et Mina où le sens unique statue sans convaincre véritablement. Comme si Didier Decoin avait eu du mal à mettre un point final à son récit. Hormis ce détail, l’ensemble vaut le détour et engage à découvrir d’autres romans de l’auteur pour constater l’évolution de son style et de ses thématiques.