Octobre 2022, nous sommes à Chiraz en Iran, face à la foule des manifestants Zahra se souvient.
Dans son pays les femmes comptent pour moitié, elle est morte le jour où elle est née. Sa mère la surnomme Badjens, espiègle ou effrontée. Elle grandit dans l'ombre de son frère Mehdi, mini despote en devenir. Comme toutes les femmes elle est invisible. A 9 ans on lui offre un tchador fleuri pour la prière et un foulard-cagoule pour l'école. Dieu a en permanence un oeil sur elle.
La télévision d'état évoque les Etats-Unis le Grand Satan, on promet des vierges en mariages aux soldats dans l'Au-Delà. A l'école on lui répète tout le temps que les homos sont des détraqués. Elle est une fille bien, elle n'a pas eu la chance de naître dans le bon pays. Ni au bon moment.
Dès que le père quitte la maison, l'appartement se métamorphose, la télé s'anime, sa maman chante. Une maman complice de son émancipation, elle lui offre cette liberté qu'elle n'a jamais eu pour elle-même.
Une jeune fille indocile et frondeuse qui contourne les interdits, les soirées clandestines, les couvertures sur les murs pour absorber la musique, les vitres occultées pour ne pas être vu de l'extérieur, le vin fait maison.
Partir loin à Séoul, sa place n'est plus ici et puis Mahsa Amini, une étudiante de 22 ans fracassé par la police des moeurs pour un voile mal porté. Sa mort libère un flot de paroles inédites, Zahra a 16 ans et elle est au milieu des manifestations.
Delphine Minoui nous fait partager la réalité du quotidien des femmes iraniennes, une vie fliquée. Ce monologue est un cri de liberté, de vie et de rébellion , le cri des femmes iraniennes qui veulent se libérer du joug de la religion, des pères, des frères, des maris. Ces femmes sont aux avant-postes de la révolution, elles arrachent leur foulard, coupent leurs cheveux.
Un texte court, fort et percutant.