Bienvenue au club par Cabro
Je me suis lancé dans ce livre à la suite de conseils que l'on m'avait donnés : "tu vas voir c'est trop bien, on comprend trop ce que c'était que l'Angleterre et on apprend plein de choses". Là je dis non. Si vous révisez le bac, préparez un concours d'entrée à Science-Po ou prétendez à un tout autre enrichissement culturel, ce livre n'est pas fait pour vous. Il faut pas déconner, c'est pas un manuel d'histoire malgré l'évocation de quelques faits nécessaires !
En revanche, d'un point de vue sociologique, on s'y retrouve. Bienvenue au club n'est peut-être pas une frise chronologique du XXème siècle en Angleterre, mais il dépeint trés bien comment cette société était vécue par la population. On suit une bande de gamins dans un Birmingham industrialisé à fond où toute l'activité tourne plus ou moins autour d'une usine. Parmi eux se trouvent un fils de syndicaliste et un fils de cadre, mais ils s'en foutent, c'est le problèmes de leurs pères ! Eux, ils découvrent la musique des années 70, commencent à s'intéresser aux filles et ont chacun leurs rêves de réussite. Au fur et à mesure, ils grandissent, les goûts de chacun se précisent, les positions aussi, parce que quand la moitié de l'Angleterre est en grêve et qu'on dirige la rédaction du journal de l'école, il faut avoir son opinion. Le conflit latent entre les classes, le difficile accès à l'éducation (car nos amis sont des privilégiés dans une belle et bonne école privée), le racisme qui découle de ces deux points, le penchant pour l'adultère afin de fuir la morosité ambiante, tout ca est évoqué.
Bienvenue au club, c'est un apprentissage. Ces jeunes se cultivent et réalisent plein de choses au cours du livre, et nous avec eux. On pense par exemple à leur pote noir. Il est certes d'une couleur de peau différente mais c'est tout, c'est un élève de la même école, un camarade en somme. Ce n'est qu'après qu'ils se rendent compte que pour lui, dans la vie, tout est plus dur. Les yeux des enfants s'ouvrent peu à peu sur la réalité qu'elle soit juste ou pas. Tout est trés objectif ici !
Quant à l'écriture, elle relève du génial ! C'est mon premier (mais sûrement pas mon dernier) Jonathan Coe et j'ai beacoup aimé. Comme tout british qui se respecte, il développe force stratagèmes pour ne pas appeler un chat un chat. Les euphémismes et autres mátaphores sont merveilleux, ce qui me fait dire que nous sommes en présence d'un des maîtres de la discipline. Et quel plaisir nous avons à déchiffrer tous ces sous-entendus, à comprendre les dialogues pour les personnages eux-mêmes !
Enfin, le dernier (je ne sais pas si on peut l'appeler comme ca) chapitre intitulé "Sous-bock vert" est tout bonnement extraordinaire. Si je ne m'abuse, il n'y a pas le moindre point en cinquante page, seulement des virgules. Virgules qui montrent le flot ininterrompu d'idées d'un des protagonistes, entre souvenirs d'anciennes conversations, réflexions pour lui-même et récit. C'est haletant et parfois compliqué à lire mais c'est exactement comme ca qu'il faut représenter un dialogue intérieur ! Qui n'a jamais vécu cette situation dans laquelle on pense à notre lendemain et où on finit par défier Dark Vador avec pour seule arme notre calecon préféré (si à moi ca m'est arrivé ! bon vous aurez compris l'idée...) ? On connaît tous ces passages du coq à l'âne, Jonathan Coe l'a écrit !
Vite le second tome !