Cérès et Vesta est une novella de Greg Egan, parue le 23 février 2017 aux éditions du Bélial’ dans leur collection Une Heure Lumière.
Greg Egan, je n’avais jamais lu, c’est chose faite. C’est un auteur de science-fiction australien, assez réputé, qui a obtenu de nombreux prix. Ses textes sont souvent qualifiés de « froids », des textes de Hard-SF avec un traitement des personnages très secondaires. De plus, il entretient le mystère autour de lui, aucune photo, aucune apparition en public.
Quoi qu’il en soit, il est lu et apprécié.
« Cérès et Vesta » est l’histoire de deux planétoïdes se situant dans la ceinture intérieure et colonisés par l’Homme.
Cérès et Vesta sont interdépendants. Le premier fournit de la glace au second qui lui fournit, en retour, de la roche. Les ressources transitent dans un ballet orbital entre les deux objets célestes.
Tout se déroulait pour le mieux, même s’il est facile d’imaginer que la vie sur un astéroïde ne doit pas être des plus agréable.
Jusqu’au jour où une frange de la population de Vesta est victime de discriminations. Les Silvadier, les fondateurs, en quelque sorte, ceux qui ont apporté la matière grise sur la colonie. Ils sont accusés de tous les maux, trop riches, trop de privilèges, basés sur des brevets leur appartenant.
La haine et les attaques à l’encontre des Silvadier montent crescendos. . La situation va vite devenir intenable.
Des Silvadiers décident de surfer sur les blocs de pierre envoyés à Cérès, pour y migrer et fuir les persécutions. Le tout se fait dans un gel cryogénique, collé à un gros bloc de roche. Autant vous dire que c’est aussi agréable que de traverser la méditerranée en Zodiac.
Cérès, face à cet afflux de migrants, doit prendre des décisions, forcément, ça déséquilibre tout et c’est d’autant plus exacerbé par les lieux exiguës dans lesquels ils vivent.
Pour couronner le tout, Vesta est contre l’accueil des Silvadiers et fait pression sur Cérès.
Vous l’aurez compris il s’agit d’une novella qui traite de l’immigration, de la discrimination et de la persécution. Il n’y a qu’à regarder la politique de l’Australie dans le cadre de la crise des migrants pour comprendre, peut-être, la position de l’auteur.
Sans taper sur son pays, il suffit de regarder tout simplement la méditerranée. Bref, le cœur du sujet est là.
Le décor planté par Greg Egan est intéressant, ces deux corps interdépendants, minuscules et isolés, offrent un parfait laboratoire des tensions que peuvent provoquer des attaques contre des minorités, la migration et l’accueil de ces dernières.
La montée en puissance des attaques contre les Silvadiers, via des discours, des phrases lâchées, des pamphlets, est bien amenée. Jusqu’à organiser des Flash Mobs punitifs ou tout le monde y participe gaiement, puisque tout le monde le fait. Flippant.
Cette situation va forcément amener des troubles, sabotages, révoltes, terrorismes…
Un autre aspect intéressant et le traitement diplomatique et géopolitique (on peut utiliser ce terme dans l’espace ?) des tensions entre Cérès et Vesta. Ce qui permet de ramener un pragmatisme certain, mais cynique.
Concernant le style, j’avais lu que Greg Egan était qualifié d’auteur « froid ». En effet, le traitement des personnages est secondaire. Mais lorsque le récit ne porte pas sur lesdits personnages, mais sur des thématiques fortes ce n’est pas dérangent.
Pour la narration, il y a deux temporalités, qui ne se dégagent pas immédiatement. Au premier abord, ça peut prêter à confusion, mais en prenant le temps de se poser deux minutes, ça passe.
Si vous aviez encore besoin d’être convaincu sur ce sujet sensible qu’est le traitement inhumain réservé aux migrants, lisez-le.
Dans les autres cas, il faut le lire aussi, c’est court (un peu trop?), percutant et efficace et c’est pas cher, 3.99€ en numérique et sans DRM.
Je vous invite à venir lire la chronique sur mon Blog, ainsi que d'autres billets.