Imaginez que vous êtes tranquillement sur votre terrasse, quelque part au cœur de l’Ariège et que, dans l’homme assis sur celle d’à côté, lisant son journal et buvant son café, il vous semble reconnaître Xavier Dupont de Ligonnès. C’est ce qui arrive au narrateur de ce roman qu’on découvre, dès les premières pages, devant le tribunal de Toulouse, accusé d’avoir tué Xavier Dupont de Ligonnès de… 94 coups de couteau à beurre !
Dès cette première scène, totalement décalée et loufoque, le ton est donné. Roman Puértolas confesse que ce drame survenu en 2011 (le meurtre d’une mère de famille et de ses 4 enfants à Nantes et la disparition du père recherché depuis lors) est pour lui une obsession.
Peut-être parce qu’il a lui-même été capitaine de police, cette affaire non résolue le hante. Au point d’avoir mené sa propre enquête qu’il nous relate ici. En mettant en scène à la fois le fugitif et le personnage d’écrivain qu’il s’est forgé dans ce roman et pour lequel il s’amuse à mélanger réalité et fiction.
Il explore ainsi de nombreuses pistes concernant le meurtrier présumé, imaginant différents scénarios à cette cavale qui dure depuis treize ans. En Espagne, aux Etats-Unis, en France, à bord d’un camping-car, en auto-stop… Romain Puértolas se glisse dans la peau de Dupont de Ligonnès et dans ses pensées intimes. Lorsque la piste s’essouffle, il revient sur ses pas pour tirer un nouveau fil de cette improbable pelote.
Mais attention, il ne s’agit pas là d’un récit farfelu même s’il déborde d’humour. Romain Puértolas se sert de son expérience de policier et de l’ensemble de ses connaissances du dossier pour mener une véritable enquête, très précise et minutieuse. Et quand l’information manque, il remplit les lacunes par son imagination de romancier.
C’est drôle, plein de trouvailles ingénieuses, mais aussi de révélations sur la manière dont a été menée l’enquête et dont elle continue d’être menée par la police. Le retournement final, même si on peut le voir arriver avant la conclusion, est aussi très réussi.
C’est un livre qu’on ne lâche pas avant la dernière page.