Parisianoparano.
De Vigan convoque stephen King et Usuel Suspect pour son thriller psychologique parisianoparano, mais en vain, elle a beau convoquer les sommités du genre, tout est toc, tout est poussif, rien ne...
Par
le 27 déc. 2015
22 j'aime
2
Depuis le début de sa carrière littéraire, Delphine de Vigan assume le fait de faire de l'autofiction tout comme Christine Angot. A part, No et moi essentiellement fictionnel, tous ses autres écrits ont abordé l'entreprise ( qu'elle connaît bien puisqu'elle y a travaillé), sa mère (ainsi qu'une partie de son arbre généalogique) et ici c'est son rapport à l'emprise via la rencontre d'une femme qui a bouleversé sa vie. J'avais entendu parler du retentissement de Rien ne s'oppose à la nuit mais D'après une histoire vraie m'a permis de comprendre la catalyse créative de l'auteur et le fait que son oeuvre fait résonance à une grande question: le réel est-il un matériau littéraire? Je sens chez Delphine de Vigan un grand doute sur sa légitimité littéraire et la mésaventure qu'il lui arrive avec L (personnalité ambigüe,duelle et toxique du livre) a réveillé ses questionnements sur son écriture mais aussi sur sa vie personnelle. L'écrivain se racontant comme pour exorciser son expérience douloureuse ne manque pas aussi de se raconter trés intimement même si elle n'utilise pas de noms de familles ou de lieux véritablement précis ( son intégrité étant en jeu). L'un dans l'autre, son livre est honnête,prenant et même rempli de moments qui permettent au lecteur de ressentir le malaise dans sa relation avec L.
Consciente de raconter un épisode difficile de sa vie, Delphine de Vigan a choisi une certaine graduation narrative pour préparer ses lecteurs à un épilogue renversant, quasi destructeur pour elle mais où elle a finalement et heureusement repris les rênes de son existence. L'écriture apparaît pour l'auteur comme un besoin viscéral d'évacuer des mauvais moments de vie tout en questionnant les postures des protagonistes/individus de cette histoire "vraie" à un moment donné. Le lecteur reçoit cela comme une gifle tout en jaugeant le talent de De Vigan, qui a le chic pour savoir faire tourner les pages aux lecteurs tout en les amenant sur les points cruciaux de son propre questionnement.
Dans la façon d'appréhender le livre, je conseillerai une lecture active par portions pour digérer la force de ce récit. Recadrer les nuances des relations entre l'écrivain et L est aussi nécessaire pour ne pas se perdre en cours de route et comprendre le pouvoir néfaste de l'emprise pour ce qu' elle est. Le personnage de L étant au bout du compte à mi-chemin entre la femme qui séquestre l'écrivain pour qu'elle écrive dans Misery de Stephen King et de Keyser Söse (du film Usual Suspects) que Delphine de Vigan cite en toute connaissance de cause.
Pour finir,que Delphine de Vigan reçoive le prix Renaudot pour D'après une histoire vraie paraît un coup de patte du destin donnée par l'intelligensia littéraire qui adhérerait par opportunisme à la mutation profonde de cette littérature qui tend vers le réel et délaisserait la fiction. Ce débat ne fait donc que commencer et demande une veille quant au devenir de la production littéraire française.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Lire 2016 et Les meilleurs titres de livres
Créée
le 7 févr. 2016
Critique lue 534 fois
3 j'aime
D'autres avis sur D'après une histoire vraie
De Vigan convoque stephen King et Usuel Suspect pour son thriller psychologique parisianoparano, mais en vain, elle a beau convoquer les sommités du genre, tout est toc, tout est poussif, rien ne...
Par
le 27 déc. 2015
22 j'aime
2
Après un précédent roman de veine autobiographique, je me demandais bien comment Delphine de Vigan arriverait à se renouveler sans décevoir son lectorat. Pari réussi haut la main en ce qui me...
Par
le 11 sept. 2015
22 j'aime
8
Comme à mon habitude, je démarre la rédaction de cette critique en confessant ma difficulté à rendre compte sobrement, objectivement, de mon engouement pour une oeuvre. En effet, la proximité que je...
le 18 oct. 2015
14 j'aime
7
Du même critique
Ce qui marque d’entrée dans Eiffel est la qualité des scènes d’époque du côté de Bordeaux où de Paris. Martin Bourboulon effectue une mise en scène épatante où chaque détail compte. Les extérieurs de...
Par
le 13 oct. 2021
40 j'aime
Je comprends mieux pourquoi nos voisins britanniques ont une affection si particulière pour Paddington.Ce petit ours péruvien et déraciné qui débarque à Londres a déjà un regard naïf mais pas tant...
Par
le 14 déc. 2014
25 j'aime
3
Jesuislà est un film retors car les vingt premières minutes du film ne vous préparent volontairement pas à ce qui va suivre. En effet, le spectateur a tout juste le temps de se baigner dans la vie de...
Par
le 7 févr. 2020
19 j'aime