Je suis venu à ce roman de la pire des manières qui soient: on m'en a parlé comme d'un roman post-apocalyptique. Or, si "Dans la forêt" est effectivement un roman post-apocalyptique il n'a que faire des codes et des trois du genre: ici pas de longs voyages sur des routes bondées des fuyards, pas de pillards sapés en SM se battant pour les dernières gouttes de pétrole. Non, ici le post-apo est avant tout un prétexte au huis clos, le genre n'est que la caution permettant la clôture de l'univers romanesque. Une fois accepté ce prémisse on peut alors savourer la profondeur et la densité de l'exploration relationnelle et psychologique à laquelle se livre Hegland. Car en fin de compte la maison familiale au coeur de la forêt qui le principal décor du roman est aussi un personnage symbolique qui, à l'image du monde qui l'entoure, s'effondre. Celles et ceux qui s'attendent à un mad max féministe seront déçues, ce dont il s'agit ici c'est d'une peinture quasiment naturaliste de l'écart entre ce qu'une génération reçoit comme héritage et la situation dans laquelle elle se retrouvent. Comment faire face à l'effondrement lorsque le monde dans lequel on a grandi, celui qui nous garantissait une grande carrière de danseuse ou d'universitaire, n'est plus ? Est-il possible de faire le deuil des rêves que nous avons eu dans l'ancien monde alors que le nouveau les empêche ? Ce deuil ne serait-il pas aussi le deuil de nos parents ? Qu'est ce que nos parents nous ont laissé qui nous permettra de faire face à l'absence d'essence et d'électricité ?
Autant de questions que ce livre nous amène à nous poser doucement, subtilement et pas à pas...