Je reproche quatre choses à l’auteur.


1) On est trompé pour être incité à acheter le livre.
Quand on le regarde en rayon de magasin, on lit en quatrième page : « Nos amis à quatre pattes prennent le pouvoir. Pour le meilleur ! »
Et quand on lit les premières pages, qui sont très drôles, on se dit que ça va être comme ça jusqu’à la fin, où les chats vont prendre le pouvoir : on se demande comment ça va se passer et on achète le roman pour le savoir.
Or à la fin, les chats ont l’espoir de transmettre un jour des informations aux humains, mais ils ne prennent aucun pouvoir.


2) L’auteur méprise ouvertement une partie de ses lecteurs.
Les gens qui croient en une religion, peu importe laquelle, sont présentés textuellement comme des humains « imbéciles » qui « s’inventent un Dieu », qu’ils se représentent « vieux avec une barbe blanche », pour le motif « qu’ils n’assument pas leurs actes » et « refusent les connaissances scientifiques ».
Tout est faux, Werber montre là une grande ignorance du sujet. Et il doit confondre Dieu avec les prophètes, car aucune religion ne représente plus Dieu depuis longtemps.
D’autre part, dans le roman les attentats sont commis par des hommes « à grande barbe noire », et « au nom de leur religion », sans pour autant préciser quelle est cette religion « qui promet le paradis en tuant ». Et tant pis pour l’amalgame avec la religion qui enseigne le pardon et l’amour du prochain « comme de soi-même » jusqu’à aimer ses ennemis.


3) L’auteur fait preuve de malhonnêteté intellectuelle.
Les « connaissances » sur les humains, ainsi présentées comme des informations irréfutables, ont été mises dans une clef USB par une humaine scientifique, qui a ensuite introduit la clef USB dans le crâne de son chat siamois, Pythagore, afin qu’il connaisse tout sur l’homme.
Ainsi, d’une part, durant toute la première moitié du roman, le point de vue athée du scientifique, que d’après l‘auteur tout scientifique devrait avoir, est présenté comme une évidence, quelque chose de logique, alors qu’en réalité, tant que la science ne peut pas tout expliquer (notamment le mystère du Saint Suaire, celui des corps non corrompus et les 70 miracles de Lourdes), l’athéisme reste une croyance lui aussi. L’enfant ne vient pas forcément au monde avec un terrain vierge de toute incidence divine, on n’en sait rien, voilà ce qui peut être vu comme une réalité.
Par ailleurs, Werber se montre de mauvaise foi. Chaque fois que, durant ses cours d’histoires donnés à Bastet, le chat Pythagore prononce un nouveau nom d'humain célèbre, la chatte lui demande qui c'est, et le chat le lui explique avec détails. Or quand il dit "ceci s'est passé en telle année après Jésus-Christ" et que la chatte lui demande qui est Jésus-Christ, le mâle savant lui répond "c'est un homme qui a existé il y a 2000 ans et depuis lequel les humains comptent les années". Et c'est tout. Et la chatte ne demande pas pourquoi ! Comme ça c'est simple, le siamois n'a rien à en dire. On parle encore de JC 2000 ans après sa mort (et sa résurrection !), il est ô combien présent dans les cœurs et les prières quotidiennes de beaucoup de gens, mais à part ça, c’est juste un humain comme un autre… et la marmotte, elle emballe le chocolat dans le papier d’allu…
D’autre part, durant toute la seconde moitié du roman, par le biais de son personnage l’auteur nous fait progressivement découvrir… les bienfaits du CHAMANISME et les joies de la croyance en la RÉINCARNATION ! Après avoir expliqué en long, en large et en travers que les croyants sont des imbéciles qui s’inventent des Dieux parce qu’ils n’assument pas leurs actes et refusent les connaissances scientifiques… comme si on ne pouvait pas justifier de la même façon, sinon mieux encore, la croyance en la réincarnation ! Après tout, grâce à la réincarnation, nous avons autant de vies que nous voulons pour nous améliorer, nous n’avons pas le purgatoire ou l’Enfer à craindre.
Werber aurait pu être plus philosophe en présentant les choses plus subtilement, plus objectivement, plus intelligemment. Parce que là, il ne peut satisfaire que les athées les plus centrés sur eux-mêmes. Je suis sûre que même un athée intelligent trouverait que son récit manque d'intelligence tel qu’il est présenté.


4) L’histoire est négligée et mal construite.
La toute la première moitié n'est que des cours d'histoire, transmis par Pythagore à Bastet. Celle-ci répète souvent que ce chat est très intelligent, par conséquent j'ai le sentiment que l'auteur veut faire passer un message, comme s'il voulait montrer ses connaissances au lecteur et le convaincre qu’elles sont la science infuse.
Dans la seconde moitié, il ne se passe en fin de compte pas grand-chose : quelques combats avec des rats, des courses, une traversée de Paris et l’esprit de Bastet qui se désincarne quand elle dort, pour voyager et discuter avec d’autres esprits d’humains dont les corps dorment aussi. Rien que du très scientifique… KrKrKr !
Mais la cerise sur le gâteau est la scène d’amour entre les félins. Je la gardais pour la fin : le parfait cliché de la première scène d’amour digne des romans à l’eau de rose, entre l’amoureuse transie et le mystérieux ténébreux qu’elle admire, qui ne manque pas, comme il se doit, de l’ignorer magnifiquement le lendemain. Quelle frustration pour Bastet, après avoir été envoyée au septième ciel à coups de « caresses de tétons » et de « baisers avec la langue » !


En conclusion, c'est une bonne idée de départ, mais mal exploitée.

SNaumiak
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le 4 mai 2018

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SNaumiak

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