Ce qui démarre lentement deviendra grand mais n’évitera pas le vautrage final.
Dogura Magura trônait depuis quelques jours sur ma table de nuit quand un soir de grande fatigue j’en entamais la lecture.
Première erreur.
Lorsque la quatrième de couverture vous parle d’une histoire labyrinthique, prévoir un esprit frais, dispo et éveillé pour franchir le cap des 100 premières pages sous peine de risquer la non-lecture.
Heureusement, le mois suivant, j’avais trois bonnes heures de trajet et ce seul livre pour divertissement. Une fois lancée, j’ai revu mon opinion : C’EST GENIAAL ! Une d’intrigue policière entrecoupée de théories psychiatriques, le tout en mélangeant styles et temporalités avec brio pour accentuer la sensation de vertige du protagoniste central et avec lui celle du lecteur. Le sujet de la folie est brillamment traité pour mon plus grand plaisir : c'est mon côté Tryrion Lannister: j'ai un faible pour les fous et autres handicapés sociaux.
Et pourtant, l'auteur s'est quand même un peu vautré. Car la fin nie tout le génial de l’auteur, la cohérence des personnages, et j’en passe !
Histoire labyrinthique me dites-vous ? Laissez-moi rire, c’est limpide ! Et un peu bidon… Je vous la refais:
"C'est l'histoire de deux savants, M. et W., qui veulent savoir non pas qui la plus grosse kikoute (ce sont des savants maléfiques, un peu de respect) mais qui a le plus gros cerveau. Leur méthode pour se départager est simple: le premier qui transforme un honnête citoyen en psychopathe puis en honnête citoyen à nouveau par le pouvoir de suggestion de leurs ondes cérébrales a gagné. Pour gagner, M. décide de faire un enfant à une femme possédant un bon potentiel de psychopathie héréditaire pour ensuite abandonner la femme et l'enfant. L'enfant grandit donc sans connaître son père, qui attend son heure dans un coin. Un jour, M. réapparaît, pif-pouf SUGGESTIONS CÉRÉBRALES, l'enfant devient un psychopathe, il est admis à l'asile où travaille M. (qui est donc son père, c'est très GeorgeLucasien comme histoire). Un jour, M. admet son fils dans son bureau, celui-ci découvre la vérité et d'un ton déchirant lance à son père: "Vous êtes vraiment méchant, ce que vous avez c'est moche, il faut que vous alliez vous excuser!"
Après quoi, M., pris de remords, se suicide.
Le personnage principal réalise ensuite qu'il a des "dédoublements de l'âme" (en fait de bonnes grosses hallucinations) et que son engueulade/ révélation avec son père date du mois dernier, qu'entre-temps ce dernier est mort et... Il retourne dans sa cellule!
FIN"
... Pourquoi????
Pourquoi Masaki, qui condamne froidement son ex pour que son expérience fonctionne, devient soudain un homme au grand cœur miné par le remord? Depuis quand un aliéné peut rentrer tranquillou dans sa cellule? Pourquoi ne voit-on plus Wasabishi à la fin?
Et surtout, pourquoi ne pas développer le thème de Dogura Magura, "roman écrit par un aliéné" qu'on montre au personnage principal comme ça, en passant, comme pour justifier le titre alors qu'il conclurait parfaitement le roman?
Évidement, Dogura Magura est un très bon roman. Mais il est passé tellement près du chef-d’œuvre que ça en est frustrant.