Le souffle retombe

Critique pour les tomes 3 et 4 du troisième cycle (tomes 16 et 17 de la saga complète de l'Assassin Royal)

On ne le dira jamais assez : l’édition « Pygmalion-charcutage » n’est pas un cadeau. Dans ce cas précis, elle scinde en deux le tome anglais – intitulé Fool’s Quest – le plus lent de toute la série. Résultat : en France, on a droit à un tome 3 qui ne décolle jamais, et un tome 4, meilleur, mais dans lequel on peine à rentrer. Deux épisodes qu’il me semble important de lire d’une traite donc, et que je critique ensemble, car en eux-mêmes, ils n’ont aucun sens.

Après une première partie de cycle 3 plutôt prometteuse, cette seconde partie fait office de transition avant la fin. Littéralement. Au sens où on le sent dans la narration qui nous donne la sensation que l’histoire n’avance pas. Ces deux tomes s’enlisent, trainent en longueur, et fatalement, sont à mon avis les moins bons de toute la saga. Pour faire court, les trois-quarts du bouquin ne sont rythmés que par les multiples allers-retours de Fitz entre Castelcerf et son domaine de Flétribois, d’une part, puis la recherche de sa fille disparue, fuyante comme un horizon qui s’éloigne toujours plus à mesure qu’on s’en approche, d’autre part. C’est lassant.

Seul le dernier quart commence à s’énerver un peu, Fitz se prend en main, assume son rôle et prend les devants. L’histoire redémarre au bout de 500 pages, on parvient à se replonger dans le récit et pouf ! Clap de fin. Suite au prochain épisode. J’exagère à peine. Heureusement, cette fin de tome 4 augure d’une suite un peu meilleure et plus riche en surprises.

Parce que le problème de cette seconde partie, ce n’est pas seulement son manque d’action – cela, Robin Hobb nous y a habitué dans de précédentes séries de très bonne facture – mais c’est que la lenteur de son rythme se couple avec une absence totale de surprise, de ressort scénaristique. Fitz passe des plombes (presque deux tomes au bas mot) à comprendre ce que, nous lecteurs, avons pigé depuis le début ! Il reste aveugle à des évidences qui, pourtant, sautent aux yeux ; alors quand il nous sort, au détour du tome 3, que sa formation d’assassin l’a doté d’un fort esprit de déduction, ben désolé mais non quoi ! Bref, les ressorts scénaristiques sont évidents, ou mal amenés, et ne permettent donc pas de relancer l’intrigue.

Le second souci, beaucoup plus personnel cette fois-ci, est le manque de nouveaux personnages marquants (pourtant une caractéristique de la saga). Seule Abeille est intéressante, et plus le récit progresse, moins elle y est présente. Lant, Persévérance et Évite me laissent indifférent, Véloce, trop vite oubliée, Cendre/Braise encore sous-exploitée. Même les anciens personnages ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes, alors difficile pour Fitz de porter tout le récit à lui seul.

Bref, tout n’est pas à jeter, on aime trop cet univers pour cela, mais Le Fou et l’Assassin (tomes 3 et 4) déçoit. Si le début de ce cycle m’avait fait bonne impression, son souffle retombe avec cette seconde partie de transition. On jugera donc de l’ensemble à l’aune de sa conclusion que l’on espère meilleure.

NB : Plus on progresse dans l’histoire, plus la lecture des séries précédentes Les Aventuriers de la Mer et Les Cités des Anciens semble indispensable, non pour comprendre le cycle, mais pour en profiter pleinement.