Un impressionnant travail de recherche et de synthèse, bien expliqué et accessible, sur les liens entre femmes et littérature en Europe de l'Ouest. On y apprend qu'il y a eu des femmes tenant des imprimeries, que les contes de fée écrits étaient à l'origine affaires de femmes, et surtout on lit à travers ces rapports à la littérature une sorte de radiographie des tentatives des femmes vers le pouvoir: les mutations de société et les retours de bâton (après chaque crise sociale, les femmes perdent le terrain gagné, comme un château de carte qui s'effondre). Le plus intéressant est le passage traitant de la perte d'expression, de droits et de la claustration s'opérant au début de la Renaissance, ça vaut vraiment le coup de lire attentivement pour discerner l'articulation de cette confiscation globale de connaissances et de statut au profit des universités(donc des garçons) et des médecins... Il est un peu déprimant de constater que dans cette histoire des femmes, jamais la sororité féministe ne transcende pour de bon les barrières de classe et de statuts: les victoires sont rares, petites et dans l'entre soit, mais l'auteur a l'intelligence de le reconnaître. Plutôt que de l'enterrer sous une naïveté positiviste en toc. Le choix de la subtilité, de l' objectivité plutôt qu'un idéalisme lourd est un baume intellectuel . Si vous avez aimé Sorcière de Mona Chollet, ce livre est un excellent développement des thèmes historiques.