Femmes et nos pensées au fil du temps n’est véritablement pas une bande dessinée au sens propre de la forme. Désigner l’ouvrage en tant que tel serait faire injure à l’immense travail de l’artiste chilienne Paulina Silva. Disons donc que Femmes est une approche de la féminité entre texte et peinture ( mélangeant le pastel et l’aquarelle). Le propos de Paulina Silva est de faire communiquer son texte et son dessin pour en faire une expérience totale.C’est réussi car l’impact de l’image n’est pas acquis sans le texte ( et inversement).Ce qui fascine, c’est que l’artiste tout juste trentenaire, a commis un travail d’une maturité remarquable.On sent une vraie réflexion sur la féminité et comment elle veut la faire percevoir aux lecteurs en utilisant le corps mais aussi les atmosphères.D’une page à l’autre, on ne sait jamais ce que l’on va trouver ( y’ aura-t-il un dessin furtif ou un portrait très technique et travaillé? Y’aura t-il une réflexion longue ou des ellipses?). Cette volonté de ne pas baliser son œuvre et de ne pas laisser le temps au lecteur de trop s’installer dans le récit génère un tempo audacieux.Paulina Silva sait le doser pour ne pas trop perdre ses lecteurs en route et nous incite même à penser que son livre doit parfois être plus ressenti que véritablement saisi.Une relecture ne serait pas non plus superflue car elle amènerait le lecteur à faire attention à d’autres détails ou à d’autres intentions. La féminité selon Paulina Silva est de toute façon à multiples résonances et on aurait tort de vouloir trop simplifier sa définition. Tentez ce voyage inspiré et habité si l’appropriation d’une œuvre par strates vous intéresse. Si vous recherchez une clarté immédiate sur ce récit, ce n’est pas le but de Femmes et nos pensées au fil du temps et vous seriez irrémédiablement déçu et déconcerté.