Reachelle Mead est une américaine qui écrit depuis 2007 et est connue pour sa série "Succubus".

Dans cette nouvelle série, pour les fans de bit-litt, tous les ingrédients sont réunis... sauf la présence des vampires, de loups garous et de zombies, c'est-à-dire tout ce qui fait la définition de bit-litt – qui vient du verbe anglais « to bite » et signifie « mordre » – ce qui suppose la présence de créatures ayant des crocs. Au premier abord, cela n'a pas l'air d'être le cas ici.

Cependant, l'héroÏNE, les armes en tout genre, les hommes sexys et dangereusement attirants, la magie, les complots, les combats, les amours impossibles, tout y est.

Eugénie, qui préfère se faire appeler Odile, se dit être chaman, est une vraie friande de Milky Way et s'amuse à reconstituer des puzzles pour se calmer les nerfs. Elle mène une enquête sur la disparition d'une jeune fille de quatorze ans enlevée par les Faës. Ses tatouages magiques lui permettent de passer d'un monde à l'autre sous la forme d'un esprit qui prend la forme d'un cygne noir. Lorsqu'elle se retrouve dans l'Outremonde, elle fait une découverte qui va chambouler son existence entière : elle est destinée à mettre au monde celui qui décimera les êtres humains.

« Ce job supportait mal les décisions morales en demi-teintes. Tout y était toujours noir ou blanc : trouver les méchants, les tuer ou les bannir, rentrer chez soi vivante à la fin de la journée. » (p. 39)

Une chose appréciable est que l'héroïne est forte de caractère. Elle représente la femme d'aujourd'hui, qui a un travail, ne désire pas absolument jouer à la mère pondeuse, et souhaite jouir le plus longtemps possible des atouts que lui procure la jeunesse.

« La rupture a été assez inattendue, pour moi comme pour lui. Je n'avais pas prévu de le trouver un jour en train de baiser l'employée de son agence immobilière. Il n'avait pas prévu de se faire choper. » (p. 38)

Un autre point positif est que l'on parle de contraception. C'est bien la première fois que je peux lire tel quel qu'il ne faut pas que l'héroïne oublie de prendre la pilule. D'accord, sans cela il n'y aurait plus d'histoire, car si elle l'oublie elle aurait un fils destiné à détruire le monde des humains, mais malgré cela je trouve que cela mérite d'être souligné.

« Aucune d'elles ne serait capable d'enfanter comme vous. Votre corps porte la promesse de nombreux enfants.
- Ça m'étonnerait. Je suis sous pilule.
- Sous quoi ?
[...]
- La surpopulation nous guette. Et je ne suis pas prête à avoir un enfant.
- Je ne comprendrai jamais les humains, répéta-t-il. » (p.149)

L'une des deux choses que je reprocherais à ce livre, est qu'elle est la fille (comme par hasard) de l'ancien et craint roi des Faës. C'était couru d'avance, et je suis un peu déçue que son origine n'ait pas pu être un peu plus inédite. Cela me fait un peu penser à "La Belle au bois dormant" qui s'est couchée plus pauvre qu'un mendiant, et qui s'est réveillée princesse d'un royaume. Trop cliché, mais il paraît que ça plait.

Le deuxième point négatif est le côté harem. Bon, il faut l'avouer ici il a un côté clairement glauque, car tous les noblaillons (surnom affectueusement donné par l'héroïne) désirent mettre Eugénie enceinte, et comme elle est fort réticente à mettre au monde un monstre de cruauté, et surtout qu'elle refuse de coucher avec n'importe qui, cela tourne rapidement aux prémices d'une scène de viol.

Cependant, il y a bien d'autres hommes qui n'ont pas de côté si sordide et qui la désirent pour ce qu'elle est. C'est un peu trop désespéré et désespérant. L'auteur ne manie pas avec autant d'adresse les scènes d'amour que de combats, et certaines d'entre-elles sont carrément déplacées et déraisonnables.

Les jeux de pouvoir, sans être aussi complexes que dans "Game of Thrones", sont intéressants et ne perturberont pas les gens généralement rebutés par ce genre d'explications et manipulations. Nous nous retrouvons à une époque semblable à notre Moyen Age, avec épée, armure, Etiquette et tout ce qui s'en suit, et l'auteur mêle avec brio les deux époques. Le personnage principal réagit de façon logique si nous devions nous retrouver dans pareille situation.

Même si Odile parfois agace à ne savoir poser un choix définitif sur son amant, elle reste courageuse et humaine dans son comportement. Avec le poids d'un futur fort noir, un amour qu'elle doit sacrifier, un cœur brisé, de nombreuses déceptions (notamment avec son beau-père), elle craque. J'apprécie cela car il est plus facile de s'y identifier. Ses pouvoirs ne lui parviennent pas d'un coup de baguette magique, elle travaille dur pour parvenir à les maîtriser, sans pour autant que la magie ne prenne une place prépondérante dans l'histoire. Mon esprit rationnel aime également qu'il y ait une théorie sur les pouvoirs et la magie, des règles à respecter. Cela ajoute une touche de réalisme, si j'ose dire.

Les personnages qui l'accompagnent sont attachants et nous permettent autant qu'à Eugénie de souffler un peu et de retrouver le monde des humains. L'auteur manie les mots et les scènes dramatiques avec habileté et parvient à nous faire entrer dans la peau d'Eugénie. La tension qui l'habite lors de ses voyages ne nous quitte que lorsqu'elle revient parmi les siens. Nous passons des rebondissements à des scènes tendres et d'autres encore étrangement cruelles ou humoristiques.

Nous nous surprenons à rouler des yeux, à souffler d'exaspération, à lui murmurer des « fuis ! », « t'as raison, c'est un vaurien, il t'a manipulée, c'est un menteur ! » et des « mais saute-lui dessus bon sang ! », ou encore à arborer un sourire idiot face à l'humour noir et le sarcasme dont font preuve les personnages. Nous comprenons l'angoisse qui étreint Odile alors qu'elle prend conscience qu'elle est à la merci de la prophétie, qui s'accomplira quoiqu'elle fasse.

Malgré la prévisibilité de certains évènements, je me surprends à me demander ce qu'il adviendra d'Eugénie Markham dans le quatrième volet de la saga, car l'auteur nous a laissé sur ce qu'on appelle un cliff-hanger qui ne présage rien de bon.



Richelle Mead, Cygne Noir, Paris, Milady, 2010, 508p.
Melowcotones
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le 22 avr. 2012

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