L'histoire est écrite par les vainqueurs.
Faisons abstraction de l'ignoble personne, de l'impropre, à qui on doit cette citation. Ce ne sont clairement pas les gaulois, les celtes, ce peuple qu'on ne sait pas encore correctement nommer plus de 2000 ans plus tard et qui confiait l'usage de l'écriture à des druides, qui pourra affirmer le contraire. César est venu, a vu… et a surtout complètement marave ce peuple de pécores déjà à moitié romanisé, dont je salue tout de même l'état des routes et le niveau de leur métallurgie (rendons à César ce qui appartient à César, lol).
Là où ça en devient intéressant, c'est quand on s'intéresse à comment il a écrit son livre. Premièrement, afin que le plus grand monde possible puisse le lire, il l'a rédigé intégralement en latin, la langue du peuple (rien d'étonnant pour un populares) et non le grec ancien, alors privilégié par les Élites. Il utilise un langage simple, afin que le livre puisse être compris par tous… ce qui rend par corolaire le livre « froid », sans grandes qualités littéraires. Ensuite, il se met de parler de lui à la troisième personne. Manière Ô combien simple, mais parfaite, afin d'ancrer le récit dans la réalité.
D'ailleurs, en parlant de réalité, César ne nie pas ce qui est évident : ce n'est pas Staline. À vrai dire, en mêlant tout aussi bien exploit militaire que littéraire, en créant un roman national, César se rapprocherait davantage de la figure du Général de Gaulle, ou d'un Napoléon, mais ne s'abaisse pas à ce statut de piètre dictateur prêt à tout afin de modifier la réalité. Il s'attribue les victoires les plus éclatantes, en laisse quelques-unes pour ses légats, n'hésite pas à mettre en avant l'ennemi dans le but de se mettre encore plus en avant (ce qui est tout de même fort vu comment Vercingétorix a pué la merde lors d'Alésia). Bref, c'est de la grande classe ! De la grande maîtrise ! De la belle propagande comme je les aime !
Il ne réécrit pas l'histoire donc, les Commentaires sur la guerre des Gaules ne sont pas un palimpseste. On se rapproche d'un texte dans lequel on aurait gommé ce qui ne nous plait pas, effacé quelques mots par-ci par-là pour les remplacer par de plus beaux, afin d'embellir son histoire. César raconte froidement les faits, le nombre de morts, d'esclaves : aucune haine ne se dégage de ses propos. Il ne compte pas effacer l'histoire d'un peuple non plus. On est loin du petit moustachu ridicule souhaitant l'extermination d'un peuple pour des motifs ridicules tel que l'arianisme.
L'ironie de la situation est telle que les Commentaires sur la guerre des Gaules restent, encore aujourd'hui, l'une des sources les plus riches si on souhaite en apprendre le plus sur les peuples de Gaule Transalpine : certains noms de peuples gaulois n'étant connu que grâce à César (qui, je l'espère n'a pas trop raconté de salades).
Mon seul regret finalement, c'est la guerre civile qui le concerna avec Pompée et les ides de Mars. Avec un peu de chance, il serait venu mettre la même douille aux Germains quelques années plus tard. Quel pied ç'aurait été !
L'édition GF que j'ai eu entre les mains m'a malheureusement un peu déçu. La présentation et traduction par Maurice Rat fait un peu vieillotte (normal, elle a été composée en 1964) et, comme vous devez certainement le savoir, la recherche a évolué sur le sujet (de la guerre des Gaules) depuis le temps. Ça reste tout de même lisible, l'index en fin de livre fait toujours plaisir (mais doit être complété avec une autre source), même si, comme toujours avec ces éditions en question, je trouve dommage de placer les Notes, elles aussi, en fin de livre.
À lire, au coin du feu, en portant votre toge préféré.
Ave César ! Ceux qui t'ont lu te salue !