Depuis que j’écris des chroniques, je lis un crayon à la main, laisse des notes dans les marges, des post-it à droite à gauche et je souligne des phrases ou des passages entiers.
Eh bien pour ce livre, vous ne me croirez peut-être pas mais je n’ai rien souligné, rien de rien. Qu’est-ce à dire… que le roman est mauvais, que je me suis ennuyée ?
PAS DU TOUT, mais alors, PAS DU TOUT ! J’avais même hâte de retrouver mon livre pour savoir où tout cela allait nous mener. Tout cela ?
Un ancien gardien de square, reconverti depuis peu en détective privé, est appelé par un prêtre, le père Steiger, et un sacristain, Beck, parce que, dans la nuit de Noël, l’enfant Jésus de la crèche a été volé, pardon « enlevé » corrige le prêtre. Notre privé s’installe à l’hôtel, espère chaque jour l’avance qu’on lui a promise, s’achète des bottines fourrées parce qu’il neige et que ses chaussures prennent l’eau, appelle deux trois fois sa femme, mange au Snack Kébab Izmir du coin et note régulièrement deux trois bricoles insignifiantes sur son carnet : des indices, une bouloche de laine bleue qu’il a retrouvée dans la crèche et des noms d’éventuels suspects. Et l’on avance gentiment comme ça sans qu’il ne se passe rien. Notre privé a beau observer les allées et venues des uns et des autres, échanger avec la coiffeuse et les clients du café. Rien. L’enquête ne progresse pas. Et pourtant, il continue de noter des choses dans son carnet, des gribouillis qui deviennent illisibles (peut-être que l’achat d’un stylo rouge lui permettrait de mettre un peu d’ordre dans tout ça, pense-t-il) et il rassure le prêtre et le sacristain : « oui, ça avance, ça avance… ».
Il est vrai que son quotidien n’est pas simple : entre le peintre qu’il retrouve régulièrement dans sa chambre en plein travail, les morceaux de mortadelle qu’il découvre dans son lit, la fenêtre qui ne s’ouvre pas, le radiateur qui siffle, les voisins un peu bruyants et la neige qui n’en finit pas de tomber… et puis sa femme qui a quelques ennuis avec la chaudière et la voiture…
Les situations sont drôles, absurdes. Cela fait un peu anti-roman policier. Mais en même temps, le suspense est là, à chaque page. Finalement, on se demande si l’œuvre n’aurait pas un caractère un peu philosophique… si, si !
Je ne veux pas trop en dire sinon que j’ai beaucoup aimé ce livre, véritable Madame Bovary de la littérature policière : écrire sur rien, disait Flaubert, oui, c’est un peu ça. Et l’on en redemande ! Je ne connais pas les autres romans de Joël Egloff mais s’ils sont de la même veine, je prends !
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