Cet ouvrage est signé par Jean-Sylvain Cabot qui a déjà réalisé plusieurs biographies chez Le Mot et le Reste (Fleetwood Mac, Eric Clapton, The Who, Deep Purple). Cette biographie est précise, claire et documentée même si elle n’apporte pas de révélation fracassante. Elle permet tout de même de mieux cerner Jeff Beck, guitariste de génie alliant finesse, technique extrême (feedback, distorsion, vibrato, pédale wah wah…) et imagination (il était capable d’aller puiser son inspiration dans toutes les musiques y compris orientales). George Martin l’a décrit ainsi : « C’est le seul qui peut faire chanter son instrument comme une voix humaine », très beau compliment et parfaitement juste. Martin a produit pour lui 2 de ses plus gros succès, les albums « Blow by blow » en 1975 et « Wired » en 76 (plus compliqué et qui conduira au départ de Martin des séances). Ce livre nous montre bien à quel point Jeff Beck a toujours cherché à innover, explorer de nouveaux territoires musicaux, que ça plaise ou non : du rock psychédélique des Yardbirds aux prémices du hard rock avec le Jeff Beck Group, du jazz fusion des années 70 au techno rock des années 2000, en passant par le blues et le rockabilly, et même la pop avec le « hit » de 1967 qu’il détestait mais chantait quand même, « Hi Ho Silver Lining », la variété des styles qu’il a abordés est sans limite, ce qui a pu déstabiliser le grand public.
Son caractère entier, imprévisible voire intransigeant et colérique l’a conduit à longtemps prendre du recul par rapport aux médias en refusant les interviews (sauf pour les magazines automobiles, sa grande passion !) et les relations avec ceux qui l’ont accompagné n’ont jamais été faciles, il suffit de penser aux liens autant amicaux que conflictuels qu’il a pu avoir avec Jimmy Page ou Rod Stewart. Sa dernière tournée à l’été 2022 est passée par l’Olympia où il avait convié son ami Johnny Depp, un très beau concert. On les sentait ce soir-là heureux de jouer et d'être ensemble. Impossible de deviner alors qu’une méningite foudroyante allait l’emporter quelques mois plus tard, nous privant d’un des plus grands guitaristes de sa génération bien que sa carrière comme sa discographie soient inégales (le creux des années 80…). Clapton en mai 2023 a organisé un concert hommage au Royal Albert Hall auquel ont participé Rod Stewart, Billy Gibbons, Kirk Hammet, Ron Wood, John McLaughlin, Susan Tedeschi et Derk Trucks ou encore Johnny Depp. Un ouvrage à recommander.