L'Art et l'Illusion par Adobtard
Je ne sais pas, Gombrich nous explique le processus psychologique de la représentation, de la création de l’œuvre et de sa réception, avec des mots plus simples que ceux que j'ai utilisé jusqu'à maintenant. Jamais je n'ai senti ne serait-ce que le reflet d'un parfum de fumisterie, d'obscurantisme forcé ou quoi que ce soit. La lecture en est profondément agréable, jamais besoin de relire un passage parce qu'on a rien compris et qu'on sent que l'auteur essaye vaguement de nous dire quelque chose derrière l'emploi de termes pompeux. C'est fluide, ça se bouquine tranquillement le soir avec une petite tisane de tilleul, on en vient à ne plus décrocher, comme un petit roman d'aventures. Et pourtant, j'ai plus appris dans ces trois cent et quelques pages pleines d'illustrations que dans 90% de mes lectures précédentes, au bas mot.
Et quel sujet, mes amis !
Puis le moindre de ses exemples est non seulement passionnant, original, mais en plus ils sont variés comme ce devrait être interdit.
Quelques illustrations ? Certainement :
Des peintures de Constable, une caricature de Daumier, la constellation du lion vue par des aborigènes, un bas relief du temple d'Amon, l'image du bonhomme de neige, des sauterelles sur bois gravé en Allemagne du XVIe, des pièces de monnaie, une peinture de Cézanne, une mosaïque de l'antiquité grecque, un peintre chinois, de la peinture italienne du XIIe, le traditionnel « Comment dessiner un chat »... la liste n'en finit plus.
Jamais je ne m'étais retrouvé à penser aussi souvent « quel exemple bien trouvé ! À la fois d'une originalité folle et d'une impertinente pertinence ».
Il jongle joyeusement avec l'histoire de l'art, la psychologie, la science, et toutes les disciplines qu'il peut trouver.
Ah, voilà ce que je cherche depuis le début de ma critique sans arriver à le formuler. Ce livre, cet essai, est fondamentalement pluriel. Il touche à tout ce qu'il peut atteindre. Et ça, c'est une qualité première pour un chercheur, pour un penseur, une qualité que j'admire très particulièrement. Il ne se cloisonne jamais dans une discipline, mais mobilise toutes ses connaissances de tous les horizons pouvant souligner son discours. Et croyez-moi, ça en fait un PAQUET. Même si entre nous, arrive un moment où on commence à boire ses paroles à tel point qu'il pourrait se passer de justifications par l'exemple.
Du coup, tout en comprenant comment moi-même je recevais une œuvre d'art, j'ai appris par exemple que les poussins reconnaissaient leur assiette à pitance non pas d'après les couleurs en elles-mêmes, mais d'après les rapports d'intensité de ces couleurs. Ou que la mouette, si l'on place un de ses œufs à proximité de son nid le rapportera, mais qu'elle rapportera aussi toutes sortes d'objets arrondis qui pour la vue et le toucher ne diffèrent pas trop de son œuf.
Et je vous fais grâce de mes remarques à propos de ses divins épigraphes.
Tout cela sans parler de la finesse de sa pensée.
Que voulez-vous que je vous dise de plus moi ? Ce livre est profondément BON. C'est le BIEN.