Mais qu'est-ce-qui peut bien jouer dans l'attribution du prix Imaginales ? Certaines années, le choix me paraît clair (Manesh, de Stefan Platteau, pour n'en citer qu'un), d'autres, comme l'année 2016 et l'Héritage des rois passeurs, me laissent perplexe.
Je me souviens que l'on avait vanté, pendant le festival, la présence de deux héroïnes fortes. Et ça n'est pas faux. Il y a bien deux héroïnes. L'une forte, et l'autre fortement rasoir.
Mais commençons par le commencement. Je vous préviens, ça va spolier.


Ravenn, princesse en exil pour tuer des dragons, doit revenir réclamer son trône car la reine est mourante, et, dans notre monde à nous, Enora est une jeune actrice (je crois? En fait on s'en fiche totalement) qui aime son frère jumeau, lequel se fait massacrer ainsi que toute sa famille le jour de leur anniversaire, par un ordre de gens masqués pas très sympas. Ca vous semble aller vite? C'est normal, ça arrive très rapidement dans le livre; je ne rechigne pas à une histoire qui démarre sur les chapeaux de roues, en général je trouve ça même très bien. Le problème c'est que voir toute sa famille se faire massacrer sous ses yeux et sans raison apparente, et en être la seule survivante (puis être traquée par les tueurs évidemment), c'est... lourd, et c'est le moins qu'on puisse dire.
Et c'est là qu'est, pour moi, le plus gros défaut du livre : l'auteur colle des événements ultra-traumatisants mais le traitement des personnages reste ensuite, pour moi, assez monolithique. Enora passe ainsi l'intégralité du reste du livre à être en colère, à avoir un "trou dans le coeur" ou je ne sais quel poncif qui sonne creux (oui, elle était facile celle-là aussi).
En fait, je ne saurais pas exactement dire pourquoi j'ai trouvé les personnages barbants... peut-être parce que je venais tout juste de finir un autre livre de fantasy qui traite la psychologie des personnages avec un immense talent (Les récits du Demi-Loup de Chloé Chevalier). Mais pour moi, les personnages dans l'Héritage des rois passeurs, c'était ça:
Enora l'énervée.
Ravenn la princesse-guerrière rebelle tueuse de dragons fine politicienne lesbienne à la sexualité hyper libérée et qui est hyper bien roulée (et pour moi, c'était encore le personnage le moins cliché).
Jana la peintre qui entre en transe quand elle peint (ce cliché de l'artiste...), mais en fait on apprend que c'était une magicienne et qu'elle peint en faisant de la magie (ce cliché de la magicienne-malgré-elle...).
Charly le mec SYMPA. Dont le sourire est un rayon de soleil (sic). Et qui tombe amoureux au premier regard. D'une femme qu'il n'a pas le droit de toucher, sinon il meurt. Ah mais en fait non, à la fin il a le droit de la toucher, la magie a changé (et oui, ta gueule, c'est magique!), et du coup il se jette sur la fille pour l'embrasser, et comme c'est un peu une gentille neuneu blonde, ben on part du principe qu'elle était pas contre (autant pour le côté féministe du bouquin...).
Et... impossible de me souvenir du nom du deuxième personnage principal. Ah, si, Julian ! C'est tout l'effet qu'il m'a fait. Traumatisé, donc alcoolique, mais finalement il était... magicieeeeen hahaha c'est incroyable.
Et des tas d'autres persos dont la particularité est qu'ils ont un truc caché (ils sont tous soit "double" d'un personnage principal, soit des magiciens cachés, soit des... dieux cachés, si si). Bref, c'est secret story et tout ce beau monde se retrouve car les deux mondes sont décidément très, très petits.


Je vous passe sur le scénario, sur le fait qu'on accepte d'aider Enora-l'énervée à se venger en faisant tuer les centaines de doubles des gens du méchant ordre qui ont tué sa famille (leurs doubles morts, ils ne survivront pas longtemps dans leur monde à eux), et que PERSONNE ne trouve ça gênant, et qu'en plus on ne laisse surtout pas Enora s'impliquer dans le massacre, parce que, vous comprenez, il faut protéger son innocence. Du coup on se contente de tuer deux cents personnes innocentes pour essayer de la "soulager", alors que tout le monde sait que ça ne marchera pas.


Bref, j'ai trouvé ce livre décevant. Décevant principalement pour les personnages. On mélange des événements très durs, graves, traumatisants, et des petites répliques légères de roman jeunesse. J'aime les deux styles, mais, ensemble, c'est bancal.
Le livre m'a moins irritée vers le milieu, parce que, je ne sais pas, il se passait des choses et je rigolais de découvrir qui était un magicien ou un dieu caché ou je ne sais quoi encore.
En revanche, j'ai apprécié que l'histoire ne soit qu'en un seul tome. D'abord parce que je n'ai pas aimé, et ensuite parce que, ça fait du bien, dans le monde de la fantasy où personne n'a l'air de savoir développer une histoire en moins de trois tomes, de voir une histoire se conclure "vite".


Je pense qu'on peut aimer ce livre, mais honnêtement, j'ai vraiment été rebutée par les personnages.

ElCaracol
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le 5 mars 2017

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ElCaracol

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