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Le texte :
Illusion Délirante d’Etre Aimé… I D E A… comme une idée pernicieuse, comme la puissance d’une idée sur deux personnes : le malade et la victime, le sujet et l’objet. Le sujet passe successivement par quatre étapes du syndrome de Clérambault (ou érotomanie) : 1/ l’exaltation ou l’instant de la révélation pour le sujet qui acquiert la certitude subite que l’objet l’aime en secret, 2/ le dépit où le sujet comprend que l’objet ne répond pas à ses stimulis parce qu’il ne peut pas, 3/ la rancune parce que le sujet conçoit que l’objet ne répond pas non pas parce qu’il ne peut pas mais parce qu’il ne veut pas et 4/ le passage à l’acte en général de nature mortifère…
Le malade construit cet amour fictif sur deux fondations contradictoires : la haine de l’objet et l’existence d’un signe déclencheur qui lui fera transformer cette haine en amour inversé obsessionnel dans la mesure où le sujet est persuadé non pas d’aimer l’objet mais que c’est l’objet qui l’aime sans s’en rendre compte.
En retournant le sentiment d’amour, le sujet va également retourner l’objet en semant en lui un doute, une obsession miroir, une graine d’auto-destruction qui fera de la victime une double victime : victime du malade et victime d’elle-même.
Florence Noiville s’est largement documentée sur le travail de Gaëtan Gatian de Clérambault qui a caractérisé l’érotomanie au début du XX° siècle, s’est fondée sur des cas précis historiques et contemporains. Elle démonte ainsi pas à pas l’intrusion provoquée par le sujet dans la vie du sujet, le harcèlement subi, les manœuvres consistant à inverser dans les regards de l’entourage la perception que peuvent avoir la famille, les amis, les collègues du rôle du sujet et de l’objet pour transformer l’un en l’autre.
Tout le paradoxe de cette pathologie vient de ce renversement des rôles, du double jeu joué par le sujet et l’objet, par l’antinomie entre l’illusion d’être aimé produite par le sujet, sa haine profonde mais réelle pour l’objet et les manœuvres de harcèlement perpétrées au nom d’une illusion obsessionnelle.
Là où le roman de Florence Noiville interpelle le lecteur, outre une écriture et une construction parfaitement maîtrisée, c’est dans sa recherche de solution, non pas à la pathologie, il ne semble pas y en avoir autrement que dans la mort, à la situation elle-même : comment l’objet peut-il s’en sortir ?
Florence Noiville inverse alors à nouveau les rôles pour à la fois instiller le doute dans l’esprit du lecteur sur la nature de la victime et sa réelle (ou pas) bonne santé mentale et dans le même temps faire du malade la nouvelle victime et de la victime une coupable.
Si le roman met une soixantaine de page à se mettre en place, la seconde moitié du récit tient toutes es promesses et plonge le lecteur dans le quotidien harcelé et halluciné de la victime.