Ce livre est publié dans la collection idées Reçues, aux éditions du Cavalier Bleu. le principe est simple : prendre, sur un sujet donné, une vingtaine d'idées reçues communément entendues dans les bistrots ou les journaux télé (ce qui est à peu près la même chose) et y répondre en une chapitre qui varie entre quatre et six pages.
Éliminons tout de suite l'aspect négatif du procédé : quatre à six pages, ça fait extrêmement court quand il s'agit de parler de sujets historiques (l'expansion de l'islam après la mort de Mahomet), théologiques (les différents courants de l'islam) ou contemporains (islam et démocratie, islam et laïcité). D'où un côté très frustrant dans ce livre, mais il faut voir chacun de ses chapitres comme une introduction au sujet. L'auteur, avec toute sa culture, renvoie constamment à d'autres textes plus conséquents où le sujet sera traité plus en profondeur.
L'auteur, justement. Paul Balta est visiblement un spécialiste en la matière. Chacune de ses affirmations est étayée par des références historiques ou bibliographiques précises. il cité des versets du Coran, des Hadiths, des textes historiques ou modernes, des faits précis. Chaque fois, il propose une argumentation solide et nuancée.
Car c'est bien là l'image que Balta cherche à donner de l'islam. Une image de nuance. Détruire l'image monolithique que cherchent à dresser les médias et les démagogues (ceux-ci pouvant être ou non musulmans). Il n'y a pas UN islam, cela n'a d'ailleurs quasiment jamais été le cas (sauf dans les toutes premières années, évidemment). Outre la différence entre sunnites et chiites, Balta insiste sur les pratiques qui varient selon que l'on est musulman d'Arabie, d'Afrique Sub-saharienne, d'Asie du Sud-Est ou immigré en Europe.
Il n'hésite pas, non plus, à montrer les contradictions qui existent entre Le Coran, la Sunna et les pratiques réelles. Par exemple, il montre que Le Coran ne désigne jamais l'islam comme une "religion d'état". Rien, dans le Livre sacré, ne prédispose à l'instauration de théocraties musulmanes (de même que rien ne prédispose à l'instauration du christianisme comme religion d'état). L'islam est totalement compatible avec la laïcité, ce qu'ont d'ailleurs prouvé des dirigeants comme Atatürk ou Bourguiba en limitant la place de la religion dans la constitution de leur pays. Balta cite Méhémet Ali, le dirigeant égyptien qui, au début du XIXème siècle, avait dit "En Egypte, il n'y a ni musulman, ni juif, ni chrétien, mais des Egyptiens". Certes, cette tendance vers la laïcité est à défendre à chaque instant (voir les attaques d'Erdogan depuis des années), mais c'est également le cas en France. Et si elles nous paraît secondaire face aux théocraties des pays arabes (par exemple), il faut rappeler (et Balta le fait avec justesse) que bien souvent, par intérêt géopolitiques à courts termes, les états occidentaux ont placé et soutenu des dictateurs pour que cela les serve (voir l'exemple de l'Iran, bien entendu, mais aussi de l'Arabie Saoudite).
L'une des grandes intelligences de Balta, c'est d'exposer des faits en quelques lignes. Une petite remarque lui suffit pour rappeler un fait historique ou lancer une réflexion. Il sait être concis sans être caricatural et sans simplifier à outrance.
Le résultat est salutaire.