Comme l'est tout ce qui est élégant, la plume de Faïza Guène est simple. L’histoire est accessible et ce qu’elle raconte est profonde.
Dès la 2ème page, j'ai ressenti de la tendresse pour Yamina que j’ai l’impression de connaître. En vérité, nous connaissons tou.te.s une Yamina. Si elle n’est pas notre mère, elle est une de ses amies, une grand-mère ou encore une voisine.
Je me suis tout de suite reconnue en Hannah, puis en Imane et en Malika quelques lignes plus loin. Et même en Omar. J’ai ri. J'ai pleuré. Énormément. Presque à chaque chapitre. (RIP ma fierté DZ). Par exemple, j'ai pleuré, heureuse, remplie de tendresse et d'amour pour Yamina qui retrouve, enfin, "son" figuier après des années d'exil en France. Un petit goût d'Algérie retrouvée en plein Aubervilliers.
L’exil, comme le déracinement, le manque, la souffrance, le sentiment de révolte qui suit celui d'injustice et d’autres détails qui pris bout à bout font le quotidien de toute une vie. Tous ces maux qu’on l’on pourrait crier, Yamina décide de les étouffer en elle. En silence. Discrète.
Tout ce que Yamina a tu pendant près de soixante-dix ans, ses enfants veulent le crier à l’aube de leur vie.
Eux sont tiraillés entre la chaleur et la simplicité d'une vie qui se pense collectivement et celle qui s'arrache violemment dans la jungle du chacun pour soi. Entre avoir deux pays, mais ne pas toujours se sentir chez soi ni dans l'un, ni dans l'autre, et l'éternelle injonction extérieure de choisir entre l’un et l'autre. Entre la tolérance et la colère, autour du jeu “Raciste ? Pas raciste ?" auquel on joue lorsqu'on tente de comprendre si le mépris et l'agacement d'un interlocuteur sont dus à sa mauvaise humeur ou bien à son racisme/islamophobie.
Comment fait-on de “tout et son contraire” quelque chose de suffisamment harmonieux pour mener une vie à peu près paisible ?
Dans Discrétion, Faïza Guène (d)écrit notre quotidien avec justesse. Pas de clichés caricaturaux, ni d'embellissements hypocrites.
Tout au long du livre, un seul détail m’a dérangée cependant. Je me suis demandé : "Mais pourquoi donne-t-elle le prix de tout ? C'est bizarre à la fin." Ironie du sort : après la lecture du dernier chapitre et des remerciements incroyablement beaux, le crâne douloureux d'avoir trop pleuré, je me suis moi-même surprise à penser : "Il m'a coûté combien ce livre, déjà ?" Un rapide coup d'œil à la dernière de couverture "19€ ??... Non, ça vaut tellement plus... Un trésor. " ✨️
Un coup de ❤️ que je te recommande.