On en ferait pas son livre de chevet, mais...

Un ouvrage dépassé, assurément. On nous y explique l'esprit français, on dénonce les auteurs qui le trahissent au profit de l'esprit allemand; on nous affiche l'apogée de la poésie XXème comme si cela allait durer pour toujours ; on parle d'objectivité, d'intention de l'auteur, de sincérité et de vérité en littérature. Bref, on est dans les années 40, la vague de la critique des années 60 n'est pas encore passée. C'est un peu comme se replonger dans une monde oublié.

En dehors de cela, Benda est un chercheur minutieux. Chaque argument est justifié, plutôt dix fois qu'une, le point de vue est clair. On pourrait voir parfois de l'excès ou de la mauvaise foi, mais quel critique ne l'est jamais?
Rationaliste sans limite, l'auteur traque les citations, attaque tous les genres - la poésie, le roman, les essais - et forme un front avec du Rousseau, du Racine, du Hugo et surtout, du Descartes. On en mange, encore, et encore, jusqu'à l'indigestion.
Si cet ouvrage fatigue, parfois - par ses notes interminables où Benda fait semblant d'être stupide - il a l'immense avantage de constituer une réelle attaque contre Proust, Valéry, Gide, Alain, etc., tous ces grands Dieux qu'on ne sait plus par quel bout prendre, qu'on peut ne pas aimer (et encore), mais qu'on n'arrive pas à attaquer : parce qu'attaquer Proust frontalement, et bien on n'en a plus vraiment le droit, ou plus vraiment le cran.

Alors, que vous soyez plutôt pour ou plutôt contre, même si vous n'arriverez pas énormément à le citer dans les copies et encore moins dans vos conversations (essayez déjà de placer le titre de trois lignes!), je pense que ce livre vaut le coup d'être lu, même un peu en diagonale, parce que mine de rien, J. Benda a encore des leçons à nous donner.
Nathaniell
6
Écrit par

Créée

le 23 juin 2013

Critique lue 247 fois

1 j'aime

1 commentaire

Nathaniell

Écrit par

Critique lue 247 fois

1
1

Du même critique

Et… Basta !
Nathaniell
9

"Je vous demande excuse monsieur, je ne connais quant à moi que des anges"

J'ai essayé d'écrire sur cet album, sur cette première chanson, sur cette chanson interminable, éreintante. J'ai échoué. J'ai effacé, réécrit, j'ai recommencé à l'écouter. Une fois, deux fois. Et...

le 9 déc. 2013

13 j'aime

Film Socialisme
Nathaniell
8

No comment

Quelle est cette bulle? Quelle est cette démence? Regarder comme premier Godard le dernier qu'il ait tourné est peut-être stupide. Soit. Mais, que la stupidité rend ce film beau. Un ensemble de...

le 9 nov. 2012

12 j'aime

Manderlay
Nathaniell
5

Lars Von Trier, critique 7

Nous revoilà pour un épisode de plus. Au tour de Manderley maintenant. On retourne dans des films plus récents, on est après Dogville. On est d'ailleurs dans un film qui se présente comme la suite de...

le 12 janv. 2014

11 j'aime