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Quand Rudolf Höss vous devient presque sympathique

Je ne passerait pas quatre chemins, j'ai absolument adoré ce livre de Robert Merle. Et je possède une absolue fascination pour la capacité que ce livre a à retranscrire une réalité si complexe, dans des mots si simples.


Robert Merle fait l'exercice ici de retranscrire la vie de Rudolf Höss, commandant d'Auschwitz en constituant son journal intime, de sa vie pré nationale socialiste, à son poste de commandant. Il nous plonge dans la descente progressive de ce personnage dans les abîmes des comportements humains. Mais là où la force de ce livre demeure, est justement cette capacité à retranscrire la rationalité Nazi dans son essence même.

Bien avant que les travaux universitaires se penche sur le sujet, comme le fait aujourd'hui très bien Johann Chapoutot en France, Robert Merle tirait déjà un portrait terriblement vrai de la machine concentrationnaire nazi, à savoir : L'application de la rationalité la plus pure, au service d'une fin irrationnelle...


C'est en tirant se portrait d'une suite d'évènements logiques, que Merle nous amène progressivement d'un Rudolf Höss fermier sympathisant des idées nationales socialistes, au commandant d'Auschwitz. On suit durant l'ensemble du livre les questionnements du personnage, où rénover la ferme et installer le plus grand camp de la Shoah semble se retrouver au même statut. Car Merle réussite ce tour de montrer la bureaucratie nazi, sans jamais expliciter son fonctionnement de manière brut, tout passe par le comportement de Rudolf Höss et tout passe parfaitement !


L'image du bureaucrate est parfaitement décrire et les questions posées semblent tellement logiques, qu'elles font presque parfois oublier l'horreur du sujet de fond. Et c'est justement dans cette capacité à faire oublier le sujet de fond que le génie de ce livre se retrouve, si bien qu'on développe de l'empathie pour Rudolf Höss à certains moments. Vision perturbante mais terriblement vraie...

En éloignant l'image du monstre, Robert Merle ne fait que souligner de manière encore plus cinglante, la dangerosité d'une idéologie qui se distille, goute par goute, jusqu'à ce qu'il ne soit trop tard, dans une allégorie parfaite du personnage de Rudolf Höss.

Si bien qu'on ressort de cette lecture l'estomac véritablement noué, en se voyant plongé dans les raisonnements du commandant, comme si ils étaient purement banals, en oubliant la réalité de leur fondement.


Robert Merle dépeint ici le portrait le plus intelligent et réel (au regard des travaux historiques sur la machine concentrationnaire) qu'il m'ait été donné de lire.

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