Serge Valère, célèbre avocat, engage Elvire Horta, généalogiste, pour rechercher les traces de sa mère, Madeleine Lauris. Cette mère aurait été détenue à Fresnes et aurait pu faire partie de la mutinerie qui a eu lieu en mai 1947. Elvire va alors se plonger dans la documentation existante pour tenter de faire revivre les événements et surtout savoir qui était Madeleine.
Dorothée Janin se base sur un fait réel pour mettre en scène son roman et interroger sur la filiation à travers ses deux personnages (Serge et Elvire) qui ont tous les deux des histoires familiales complexes.
Toute la partie concernant cette révolte, épisode méconnu de l’après-guerre, est très intéressante. Celles qui concernent Serge et Elvire le sont malheureusement un peu moins et complexifient le récit plus qu’elles ne l’enrichissent.
Le fil ténu de la révolte de ces filles qu’on dit perdues (voleuses, fugueuses…) est sans doute trop court pour tisser une histoire complète sur la base de ce qui est connu. Alors, pour ajouter du corps au récit, l’auteure nous plonge dans une fiction parallèle. Elle y ajoute l’histoire de Fresnes, réelle, en 1947, dans cette immédiate après-guerre où bon nombre de collaborationnistes y étaient emprisonnés. Le lien avec les jeunes révoltées ne se fait pas naturellement en dehors de cette proximité de date et le fait que cela se passe à Fresnes. Et les incessants allers-retours entre ces différentes strates du récit brouillent l’intrigue.
Parmi ces jeunes révoltées, peu de visages émergent ou de manière trop superficielle mais quand cela arrive, l’intérêt du lecteur s’éveille, l’émotion nait. L’événement est documenté par un certain nombre d’archives (articles de presse, documents judiciaires, témoignages des surveillantes de Fresnes et même lettres des prisonnières). Des archives que Dorothée Janin nous permet de lire et qui donnent une voix à ces jeunes filles oubliées, détenues dans des conditions déplorables. Et qui éclairent aussi sur le travail des surveillantes et éducatrices tout en donnant un point de vue sur une époque assez particulière.
Là encore pourtant, le lien semble compliqué à faire pour l’auteure entre fiction et réalité et le personnage de Madeleine Lauris peine à intégrer cette histoire. Quant à la conclusion, elle interroge sur les motivations de Serge Valère concernant cette pseudo-enquête sur sa mère.
Au final, la page d’histoire est passionnante, le récit fictionnel moins accrocheur. Dommage.