Alors qu’il fait visiter la Scala à un groupe de touriste, Enzo se retrouve face à Carlotta Berlumi. Si pour le jeune homme ce nom n’est pas inconnu, c’est parce que son grand-père lui en a beaucoup parlé et est un admirateur de la soprano. Mais qui est-elle en réalité ? A présent très âgée, inconnue de tous, elle soutient qu’elle a été la plus grande rivale de Maria Callas qui l’a éclipsée alors qu’elle avait bien moins de talent. Affabulations de vieille femme ou réalité ?
Dans ce roman de 130 pages qu’on peut lire d’une traite, Eric-Emmanuel Schmitt dresse le portrait d’une femme aigrie qui n’a jamais accepté que le succès lui tourne le dos et qui cherche à rejeter la responsabilité sur celle qu’elle imagine être à l’origine de sa disgrâce.
Mais attention, malgré ses accents de vérité, il ne s’agit pas d’une biographie car... Carlotta Berlumi sort tout droit de l’imagination de l’auteur !
Mais quel merveilleux personnage ! Colérique, jalouse, d’une sublime mauvaise foi, parfois ridicule, c’est aussi une femme solitaire qui vit dans un passé révolu sans accepter que le temps a passé et qu’elle a disparu des mémoires.
En creux, Eric-Emmanuel Schmitt nous dresse aussi un portrait de Maria Callas, de son irrésistible ascension à la chute. Les deux femmes sont ainsi comme les revers d’une même médaille. Carlotta et sa conception de la musique et des rôles qu’elle interprète qui se base sur de la technique face à Maria et ses talents de tragédienne qui s’allie à sa voix, parfois imparfaite mais qui emballe le public. La bataille des anciens et des modernes en quelque sorte, dont Maria sortira victorieuse.
L’auteur émaille ainsi son roman de faits réels concernant Maria Callas, comme cet épisode en 1958 où la Diva, après l’acte I de Norma, s’enferme dans sa loge et renonce à poursuivre le spectacle alors même que le président italien se trouve dans la salle ! Eric-Emmanuel Schmitt imagine que c’est parce que Maria a croisé le regard de Carlotta dans la salle (en vérité, Maria avait pris un coup de froid et sa voix n’y avait pas résisté).
Ce roman est aussi une ode à la musique, aux plus grands rôles féminins du répertoire immortalisés par La Callas dont on fête les 100 ans de la naissance le 2 décembre prochain. Et il donne surtout envie de réécouter Maria Callas !