Seulement un business ? Non, c'est aussi un art !

(Critique de la cinquième et dernière édition)

J'ai toujours voulu lire une rétrospective sérieuse d'un de mes loisirs préférés, le jeu vidéo, un bouquin qui m'embarquerait dans une épopée passionnante en dressant le portrait des créateurs qui m'ont bercé ou ému à travers leurs oeuvres... Une étude dans laquelle le jeu vidéo serait considéré à sa juste valeur d'art majeur. Le pavé d'Ichbiah semblait correspondre à ces critères mais, après lecture, je dois avouer que le pari n'est pas totalement relevé...

Forcément, quand il est question d'un si vaste panorama (on parle d'un média qui a plus de quarante ans), des choix doivent être opérés pour ne pas se perdre. A ce titre, les premiers chapitres m'ont convaincu: Pong, Super Mario, Tetris, Alone in the dark, Myst, Tomb Raider... Les jeux sur lesquels se concentre l'auteur sont certes souvent grand public mais marquent vraiment, à différents niveaux, l'évolution du jeu vidéo. Surtout qu'il n'hésite pas à faire des apartés de temps en temps au sujet d'autres jeux qui, eux aussi, ont eu une importance capitale, sans toutefois entrer dans les détails en ce qui les concerne.

Les jeux élus ont donc tous droit à un chapitre entier qui leur est consacré. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est précis: tout, tout, tout, vous saurez tout sur les processus créatifs qui ont amené les développeurs sur le chemin de la gloire, leurs tâtonnements, leurs soucis techniques et financiers, leurs envies de suicide et leurs préférences sexuelles... Enfin, peut-être pas jusque-là, mais l'impression de suivre des tranches de vie entières est souvent bien présente et donne à cette saga une incontestable saveur de nostalgie et de rêve. Du moins, au début. Au fil de l'avancée chronologique, le récit s'embourbe parfois (de plus en plus) dans une description d'entreprises en listant les défis financiers et autres entrées en bourse qui constituent l'essence même de notre monde capitaliste. C'est intéressant, je ne dis pas le contraire, mais à faible dose. Le livre dépasse les 500 pages brochées (donc plus grandes qu'un livre de poche)... Difficile d'éviter les répétitions et même parfois, avouons-le, l'ennui.

Le côté créatif du développement vidéoludique est parfois clairement noyé sous une avalanche de chiffres et de noms qui, à force de nous submerger, perdent presque toute signification. D'autant plus qu'AUCUN index ne nous aide à retrouver telle ou telle occurrence, ce qui est juste profondément stupide dans une telle étude. Imaginez un peu: on vous parle de Gaëtan Tacule, qui bosse pour Sega. Une note en bas de page vous signale qu'on a déjà parlé de lui 5 chapitres plus tôt et qu'il est donc inutile de préciser à nouveau qui est ce gars. Super. Sauf que j'ai lu ce chapitre il y a 10 jours de ça, qu'entre temps j'ai eu une vie, je suis allé à la pêche, je me suis tapé 3 cuites et une diarrhée aiguë et que j'ai complètement oublié l'existence de ce gars même si, effectivement, son nom me dit quelque chose. Vu l'absence d'index, la seule chose à faire est de lire en diagonale le chapitre en question et de prier pour retrouver rapidement le nom et la vie de ce gus. C'est pas gagné...

De plus, malgré la pertinence des trois quarts du bouquin, les derniers chapitres se concentrent sur des effets de mode très discutables au niveau "intérêt ludique", du genre: la Wii, les applis IPhone, FarmerDaube sur Facebook, Kinnect... Une fois encore, c'est pas inintéressant, mais je pense qu'il y avait d'autres choses des années 2000 à mettre en valeur pour appuyer le côté artistique des jeux vidéo: Deus Ex, Metal Gear Solid, Silent Hill, Ico... Nada. Bon.

Enfin, notons le nombre invraisemblable de coquilles qui parsèment les premiers et les derniers chapitres, le milieu étant étrangement épargné (le correcteur a du être employé à mi-temps). Des trucs énormes comme "Jeux VidéoS" (aaaaargghhh) ou des mots en trop (!!!). Ca aide à crédibiliser notre passion aux yeux du grand public, ça...

Malgré un côté vachement perfectible, soyons franc: le travail d'Ichbiah est unique en langue française et très solidement documenté. Rien que pour cette raison, il mérite que vous y jetiez un oeil...
Amrit
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le 26 juin 2012

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