Grand classique de l’uchronie, je m’étais laissé convaincre par ce roman qui s’annonçait intéressant, avec un pitch plutôt intriguant. Au final, il en sort une semi-déception, principalement à cause de sa première partie. J’ai beaucoup aimé l’idée que le texte se base sur un évènement peu connu (ou du moins peu enseigné) de la Seconde Guerre mondiale pour en faire son point de divergence. Ce que j’ai beaucoup aimé, c’est que contrairement à beaucoup d’uchronie se basant sur la Seconde Guerre mondiale, le monde tel qu’il est dépeint n’est pas nécessairement une dystopie, mais simplement une réalité alternative issu de plus de cinquante ans d’histoire. Et dans le même registre, ce n’est pas un roman d’anticipation, donc si certaines questions sur notre société sont bien présentes, elles n’en sont pas centrales. C’est un résultat plutôt intéressant donc et que j’ai beaucoup apprécié car différent de ce que j’ai l’habitude de lire en général dans ce genre-là.
Autre point que j’ai apprécié, c’est qu’au final, on s’attarde très peu sur l’uchronie, mais sur le point de divergence lui-même. Et là où ça devient vraiment passionnant, c’est que le roman, sous sa forme pseudo-épistolaire, adopte le choix du narrateur non-fiable en plus d’y instaurer plusieurs points de vue. J’ai trouvé l’idée bien adaptée pour justement ce genre d’histoire, car en se concentrant sur le point de divergence, il devient difficile de démêler le vrai du faux, surtout quand on a des versions contradictoires. Ce qui m’amène en fait au point à l’origine de ma déception : la première partie du livre. En soit, ce n’est pas tant qu’elle soit mauvaise ou peu intéressante, mais c’est que le choix d’avoir une lecture achronologique rend l’ensemble très laborieux à suivre, surtout qu’on revient plusieurs fois sur certains passages. Au point que ça commence même à devenir chiant à la longue.
Autant en film, selon le montage, ça peut bien passer, autant là ça manque vraiment de dynamique. Alors qu’au final, l’histoire qu’on nous raconte est très intéressante, surtout si on la met en parallèle avec les autres parties, et où l’interprétation devient alors tout autre. J’ai beaucoup aimé la dernière partie, parce que justement celle-ci va être très dynamique et beaucoup mieux « montée », moins laborieuse à la lecture. D’autant plus que tout se met peu à peu en place pour une fin douce et amer qu’on voyait venir, mais qui remet tout le reste du récit dans une nouvelle perspective. Et ça, j’ai vraiment beaucoup aimé.
La Séparation est donc déjà un classique de l’uchronie, mais n’est définitivement pas à la portée de tous. On pourrait le croire réserver aux amateurs du genre, mais ces choix scénaristiques et de construction font au contraire une découverte intéressante pour les novices. C’est plus au niveau de sa narration même qu’il s’avérera difficile à lire, mais le résultat en vaut la peine. Voilà un livre qui fiat réfléchir son lecteur !