La Situation de la classe laborieuse en France par Ernest Lefoulon

La critique marxiste se réveille, et ce n'est pas pour me déplaire.

On a fait les gorges chaudes des marxistes hétérodoxes, selon qui on pouvait dire des choses plus intéressantes sur Marx que les thuriféraires de l'Eglise marxiste. On s'est trompé. Antoine Vatan, docteur en économie, s'applique dans ce livre à appliquer les concepts marxistes d'analyse de l'économie à la situation présente.

Selon lui, le capitalisme est arrivée dans une phase classique de surproduction et de baisse de la plus-value par la valeur marginale. Pour les marxistes, le capitalisme sécrète naturellement sa propre contradiction. Si à l'origine les nouvelles productions enrichissent les propriétaires (les "bourgeois"), petit à petit elles sont moins rentables : la concurrence, l'innovation des machines partagée par les autres producteurs, les droits sociaux rendent l'acquisition de la plus value moins importante. Pour accroître des profits en dépit de cette baisse tendancielle, les capitalistes ont trois options : dévaluer le capital (guerre ou vente), augmentation de l'exploitation (baisse des droits des travailleurs) ou développement de nouveaux marchés d'exportation (vendre de la m*rde en Afrique, par exemple) ou d'exploitation (faire fabriquer la dite m*rde en Chine).

Pour Vatan, le capitalisme, en 1945, était censé s'effondrer ; il a été sauvé par les guerres et l'ouverture de l'atelier du monde (l'Asie) ; ces deux facteurs ont permis à l'Occident, de manière inespérée, de continuer le profit temporairement. La mondialisation a été le dernier stade de cette nouvelle recherche de canaux de plus-value. Maintenant, l'Europe voit elle-même se richesse disparaître, s'étant désindustrialisée : mais c'est aussi le cas du monde entier, où le profit diminue tendanciellement, ce qui se traduit par une augmentation de l'exploitation de toutes les couches sociales, toutes prolétarisées à l'exception des derniers grands capitalistes monopolistiques (coucou Bernard Arnault). La solution temporaire a été d'ouvrir au marché des pans économiques publics (santé, éducation, autoroutes) et de faire financer par les travailleurs eux-mêmes les entreprises nationales (les fameux prêts et bourses de soutien à l'entreprenariat...)

La situation de la France est celle de la rencontre d'un destin : plus que tout autre pays, elle a subi de plein fouet la désindustrialisation et la dégradation du prolétariat, l'oppression progressive des classes moyennes et la prolétarisation de toute sa société, dont le salaire oscille entre 1000 et 6000e. La révolution communiste est la seule option, dès lors, la solution logique de cette situation, car elle est la seule par laquelle le développement anarchique du capitalisme trouvera sa fin ; dans le cas contraire, le fascisme mou exercera la contrainte sur petit à petit toute la population. La France a une tradition historique de lutte des classiques (peuple "classique des révolutions", selon Lénine). Elle l'a prouvé par les gilets jaunes : elle le prouvera bientôt. Car il a plu à Dieu, dirions-nous en imitant Saint-Simon, de lui donner l'élite la plus corrompue et incompétente du bloc occidental, la seule capable d'appauvrir et d'humilier son prolétariat entier sans se rendre compte du châtiment futur.

On peut ne pas être communiste : mais tout bon Français devrait lire ce livre, conçu comme exposé doctrinal pour comprendre la situation actuelle du pays. Qui a la connaissance des causes de ses maux peut les résoudre, disait Lucrèce - que ce soit selon Marx ou par une autre voix.