Un tome daté

Il est toujours dangereux de juger des œuvres en y appliquant notre regard contemporain, mais honnêtement cette histoire d'un médecin de 59 ans qui fait tourner la tête d'une jeune de 25 ans, m'a finalement assez peu intéressée. J'ai été gêné par cette héroïne assez naïve, par cette histoire presque incestueuse sans que cela ne pose vraiment de problème (à part aux villageois mais qui sont représentés comme les jaloux). Non seulement c'est sa nièce, mais en plus c'est lui qui l'a élevée et il a donc une figure d'autorité sur elle. J'ajoute qu'elle l'appelle "mon maitre" histoire de donner encore plus de malaise à la chose. Notons aussi que ces deux personnages, alors qu'ils n'ont plus rien à manger, gardent la servante mais surtout il faut attendre qu'il ne reste plus que deux pommes de terre pour que la jeune fille pense à vendre la tonne de bijoux que son mari lui a achetée. Bien sûr, ce dernier fera une esclandre avant de se raviser.

Ajoutons à ça que lorsque la dame doit partir pour Paris (sur les conseils de son mari), elle ne reverra jamais son époux car celui-ci va décéder. Classique chez Zola de faire mourir un personnage à la fin (encore que, ici il reste encore 100 pages, je me souviens de certains tomes où le personnage principal tombe malade page 498, agonise page 499 et meurt à la dernière page, la page 500).

Donc oui, je ne veux pas être le bien-pensant mais franchement cette histoire est vraiment dérangeante à lire et surtout elle ne présente que peu d'intérêts tant les personnages sont vides et apathiques.

Pour autant je trouve pas le roman désagréable à lire. Autant certains romans de Zola m'ont vraiment agacés, autant là j'ai lu cela sans que cela m'agace, juste en trouvant le tout vide.

Il n'est même pas possible de profiter de la description d'un milieu comme il avait pu le faire (les Halles, les mines, la bourse...).

Comme c'est le dernier tome des Rougon-Macquart, je me permets de faire une critique plus générale de l'oeuvre. Il m'aura donc fallu environ 3 ans pour terminer ces 20 tomes (sachant que je n'ai pas lu que ça en 3 ans). Globalement j'en ressors vraiment déçus. Certains tomes m'ont vraiment beaucoup intéressé, d'autres moins tout en appreciant la description d'un milieu et une vision aiguisée de cette époque là... autant je trouve que beaucoup ont des défauts que je n'apprécie pas. Un certain misérabilisme (déjà je ne suis pas convaincu qu'avoir placé le gêne de la folie dans cette famille soit si pertinent, si son but était de proposer une vision globale de l'Empire de Napoléon III, je trouve qu'une famille plus lambda aurait pu être plus intéressante, ce qui n'excluait pas d'inclure des personnes dérangées, mais le thème de la folie ne m'a pas convaincu), un certain détachement vis à vis des personnages (comme je le disais on les sent soumis au récit, juste là pour subir les épreuves de Zola et mourir à la fin) et globalement une certaine tendance à tourner en rond (il y a des tomes où la narration n'avance pas et où on doit relire 10 fois les mêmes choses). Oui, le naturalisme n'est pas pour moi.

Et enfin, pour revenir sur les différents tomes, voici un petit classement personnel.

J'ai apprécié lire Le ventre de Paris, Au bonheur des dames, La joie de vivre, Une page d'amour et La bête humaine.

Dans une moindre mesure, je trouve que Nana, La fortune des Rougon, La conquête de Plassans et L'oeuvre sont intéressants même si j'avoue qu'ils m'ont aussi un peu ennuyés par moment. Mais ça reste une lecture positive.

Viennent ensuite La faute de l'abbé Mouret, L'argent, La débacle, Le docteur Pascal et Germinal que je n'ai pas aimés.

Enfin, les derniers se sont révélés être pour moi des moments de lecture pénible : L'assomoir, Pot-Bouille, Le rêve, La terre, La curée et Son excellence Eugène Rougon .

Voilà pour moi.