Une bonne suite mais...

Concrètement, ce Jour des Fourmis est une bonne suite du premier roman. Il reprend la même recette, mais y ajoute quelques ingrédients et c'est à ce niveau-là que ça divise. En effet, même s'il poursuit l'idée développé dans le premier tome, B. Werber modifie quelques données, et ce pas toujours de manière honnête avec son lecteur. C'est à ce dernier de s'adapter ou de jeter le bouquin. Pour que la suite soit légitime, pas le choix de traficoter les souvenirs des lecteurs. Ainsi, à moins que j'ai mal lu la fin du premier, il me semble que le début de ce deuxième la transforme un petit peu pour que l'histoire passe. Si on tasse un peu, ça devrait passer, voilà probablement ce que s'est dit B. Werber. Ceci dit, on peut vite oublier ce bref changement. Néanmoins, il y en a un qui est latent tout au long du récit : l'orientation du livre. Dans le premier, on lisait une histoire vraisemblable qui, si elle n'était pas réelle, faisait de son mieux pour en avoir l'air. Ici, que tchi ! Le vraisemblable va dans le dépotoir comme les fourmis mortes (quel lien admirable avec le roman) et on rentre plus franchement dans la science-fiction, la vraie. Plus question d'avoir des fourmis qui s'organisent comme les petites bêtes de nos maisons, de nos campagnes et tout et tout. Les fourmis, maintenant, elles ressemblent de plus en plus aux humains, en devenant individuelle, elles existent de plus en plus pour elle-même et non plus pour la fourmilière. Elles ressentent de l'ambition, de la curiosité, de la peur, bref des émotions. Ce virage dans l'histoire n'est honnêtement pas du tout dégueulasse. Il est peut-être un peu trop franc, ou pas assez. Personnellement il m'a provoqué une certaine gêne, comme un gratouillement dans le coude et je ne sais pas très bien la raison. Je crois que je ne savais plus trop si B. Werber faisait cette suite bien pensée pour l'art ou pour l'artgent ! Quoiqu'il en soit, c'est un changement qui démange mais très plausible dans la progression de l'histoire. Donc je valide !
Autre changement un peu moins sympa : notre Chli-Pou-Ni tant aimée, pour laquelle notre souffle s'est plusieurs fois coupé dans le premier roman est ici une sorte de despote ambitieux (pléonasme ?) qui fait beaucoup penser à cette mère qu'elle voulait tuer dans le premier tome. Au final, j'aurais préféré une 57éme morte dans son aventure magnifique et la méchante reine du premier encore en vie plutôt que voir mon personnage préféré changé en méchant sans grand charisme.
Le changement que je ne pardonne pas : Edmond. Tout à coup, notre brave misanthrope se radoucit dans une seconde Encyclopédie et semble soudain plus humain (si je puis dire) ce qui m'a fait tiquer. Edmond, c'était le personnage mystérieux, dont on ne sait pas grand chose et surtout pas totalement ce qu'il pense. Ici, il a perdu un peu de son charme.
Pour le reste, le livre est tout simplement aussi génial que le premier, se lit tout aussi bien (mais pour deux fois plus de volume) et possède toujours une histoire agréable. Mis à part une fin de roman digne d'une série japonaise tellement il est totalement WTFesque !