Le Livre des choses perdues par Aske
Ce livre est fantastique, dans tous les sens du terme.
On pourrait le rapprocher d'un Alice au pays des merveilles qui aurait mal tourné, d'un Labyrinthe de Pan, ou d'autres choses, c'est vrai. Mais il est pour moi bien loin d'une resucée d'X ou Y donc je préfère prendre des pincettes avec ces comparaisons faciles. C'est une oeuvre très sombre pour de la littérature de jeunesse mais je ne pense pas, comme j'ai pu le lire notamment dans des avis de bibliothécaires, qu'il faille le réserver aux adultes pour autant. Le deuil, le refus d'une cellule familiale recomposée, la jalousie d'un enfant vis à vis d'un frère ou d'une soeur, toutes ces thématiques concernent directement le jeune public et je ne pense pas qu'il faille leur cacher. Ce livre existe dans sa version jeunesse (couverture rouge) et dans sa version adulte (couverture bleue) bien qu'il n'y ait que la couverture qui change. Prenez chacun le vôtre, et enjoy.
Je l'ai étudié pour un cours sur l'initiation dans la littérature de jeunesse, et le schéma mort symbolique/traversée du monde de la mort-épreuves/renaissance symbolique marche parfaitement.
David poursuit sa quête initiatique dans un monde tordu peuplé de loup-garous, de trolls et de harpies en tout genre, monde né et nourri des peurs des enfants qui sont passés là avant lui. David va devoir affronter les siennes s'il veut espérer rentrer chez lui.
Le point fort du roman réside dans sa réécriture des contes de notre enfance, originale, incisive, parfois drôle, souvent cruelle. Celle de Blanche-Neige n'apporte pas grand chose à l'histoire si ce n'est une touche d'humour salvatrice dans un monde, il faut le dire, bien glauque.
Celles du Petit Chaperon Rouge et d'Hansel et Gretel proposent une version terrible de ces contes, qui sonnent comme un avertissement à David. Et celle de la Belle au Bois Dormant donne lieu à l'un des moments les plus forts et les plus symboliques du récit.
J'ai cherché longtemps d'où provenait le personnage du Tricheur, cet homme biscornu qui rôde autour de David tout au long de son parcours en cherchant à le détourner de son chemin, personnage terrible qui règne en maître dans ce royaume sordide. La réponse m'est venue en regardant la série Once Upon a Time: l'analogie entre le Tricheur qui vit de pactes maléfiques et le personnage de contes allemands Rumpelstiltskin est évidente.
La fin douce-amère laisse un sentiment ambigu, mais soulage, quelque part, de ne pas avoir droit à un énième happy ending classique et colle bien avec cette oeuvre qui renverse justement les classiques.
A relire, pour ma part.
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