Ce livre est présenté partout comme l'élément fondateur de la Science-Fiction. Celui qui a permis l'émergence de ce genre littéraire.
Rien de moins.
Mais c'est faux.
Là où la Science-Fiction se base sur des connaissances (réelles ou supposée) d'une ou plusieurs disciplines scientifiques comme l'astrophysique, la biologie, l'intelligence artificielle ou autres et de leurs avancées probables, "le monde des Â" s'inspire de quelque chose de beaucoup plus large que ça : le concept de la sémantique générale, non-aristotélicienne (ou non-A) au cœur de ce livre, n'est pas scientifique. Il s'agit d'une réflexion sur la science elle-même, sur la validité de ses méthodes et des connaissances qu'elle produit, sur ses alternatives.
Le monde des  ce n'est donc pas de la Science-Fiction, mais de l'Épistémologie-Fiction.
Rien de moins.
Voilà pourquoi il convient de se gratter assez souvent la tête pendant la lecture, parce que putain, qu'est-ce que c'est complexe ! Qu'est-ce que c'est que ce mode de pensée qui interroge les connaissances de manière totalement contraire à celle dont on nous a rabâché les oreilles ? J'ai constamment eu l'impression d'être à la limite de la compréhension, que j'en tenais le début, et que le fond n'était plus très loin, pas complètement inaccessible.
Rajoutez à cela la traduction de Boris Vian remarquable (enfin une traduction qui a du style !), et le plaisir de tenir entre ses mains une œuvre intelligente est à son comble.
Rien de moins.