J'hésite, face à cette nouvelle qu'on dirait conte philosophique ou récit initiatique, entre l'émerveillement sans reste ou la sensation d'un trop de didactisme. J'y trouve comme la face nocturne et créolisée dans son refus de tout surplomb et de tout immobile, d'un "Jonathan Livingstone le Goéland", et, à l'instar de son prédécesseur et peut-être modèle inversé, j'y entends beaucoup de la littérature des mystiques, clefs et résonances.
"Je ne cherche pas. Je ne trouve pas. Je vais ainsi." dit le vieux papillon au jeune.
Chamoiseau-"mystique", oui. Et l'émotion me reste fraiche de certaines pages ivres de présence qu'on trouve en son Empreinte à Crusoé. Je suis un peu plus réservé pourtant, peut-être, devant les facéties d'ombres de ce petit papillon de nuit. Les récits à clefs conservent quelque chose de factice, d'autant plus quand ils se déplient autour du message qu'au fond, de clef, il n'y en a pas - mais libre au lecteur de se laisser croire que ce miroir-là avait été prévu.
Plus réservé, je suis, donc, mais pas moins touché : ce petit livre induit des résonances qui font qu'à deux mois de sa lecture, j'en entends encore certains accents, vibration de certaines cordes que j'associe au zen et au tantrisme peut-être, ou au bouddhisme, sans qu'elles soient tout-à-fait de cet ordre-là, je crois.
"Tous les degrés de la joie dans tous les degrés de la peur. C'est cela le merveilleux de vivre."
Un coup de coeur, assurément, jusque dans mon insatisfaction.