Ma mini critique est de 2022; je la corrige en 2023 suite à ma découverte de bugs l'ayant déformée, tronquée et rendue encore plus illisible qu'elle ne l'était au départ.
En découvrant ce court livre republié aux éditions Wombat, j'ai imaginé et croisé dans les rôles Sean Connery, Louis de Funès, Pierre Brochant du Diner de cons, voire même Carrie en Sissy Spacek...
...car le personnage devient Roi, comme Sean dans un John Huston,
puis il est méchant avec son serviteur, comme Louis de Funès,
puis il piège un gentil naïf comme l'est Carrie etc.
...puis ça devient pire et plus noir.
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Ce très court roman ou nouvelle de 1990 de Roland Topor m'a d'abord rappelé un bon court-métrage de Roman Polanski de 1960 qu'Arte me faisait récemment découvrir: 'Le gros et le maigre' (où "Un serviteur maigrelet joue de la flûte et du tambour pour amuser son imposant maître qui se prélasse au soleil devant son manoir. C'est la loi du plus fort..."
"De rien", devient par un concours de circonstances Roi et maître d'un peuple sur une île.
Un peu comme une des femmes en première ligne du Covid ou autre, se retrouve par ses compétences en pêche manuelle, CEO et guru sur l'île déserte dans 'Sans filtre' de Ruben Östlund en 2022.
Sauf qu'ici, notre Robinson Crusoé torture plutôt son Vendredi.
Notre soi-disant civilisé débarquant, se révèle un sauvage désoeuvré.
Proutto, son disciple, le prend pour un dieu, le Dieu "Gisou".
Gisou prend plaisir à tourmenter Proutto de toutes les sortes à base d'épreuves qu'il lui assigne et de balivernes, on dirait 'fake news' de nos jours.
J'ai tour à tour visualisé en Gisou, le Roi, parfois Sean Connery dans L'homme qui voulut être roi
puis parfois Louis de Funès maltraitant Blase dans La folie des grandeurs ("vous êtes trop grand")
avec une énorme louche du sadique condescendant et suffisant, Pierre Brochant dans le Diner de cons,
voire le petit-ami de Sissy Spacek dans Carrie qui la piège et mène à la scène du seau de sang.
Sang, ici, remplacé par des ...noix de cocos, puis des petits singes.
J'ai surtout vu Michel Bouquet (que j'avais croisé comme beaucoup en Übu Roi sur scène): lors d'une scène démente de Mont Rushmore, il m'est revenu un des monologues d'Alfred Jarry où Ubu ordonne que les rivières et paysages dessinent son profil.
Sinon Hanibal Lecter ne tarde pas à aussi venir à l'esprit, quand on visualise dans son cinéma intérieur ce Gisou.
Il rappelle aussi les Espagnols débarquant en Amérique du Sud, violant les indigènes des tribus.
Même les petits singes sont la cible de Grisou: il aime leur jeter des pierres.
Il aime aussi suivre un lézard , pour se distraire...mais en lui ayant auparavant couper les pattes ...arrières.
__(bien sûr, le livre se moque aussi des religions et des créations artistiques qui leur sont liées) "Je chante ta gloire, Gisou. Il faut que tout le monde sache quel magnifique Dieu vivant tu es."
"Apocryphe biblique"?
"Pourquoi tu as fait bouger la terre?" est un fort moment où le faux Dieu utilise un événement comme Tintin dans 'Le temple du soleil'.
___J'aime quand l'esclave sauve plusieurs fois le maître ingrat: une fois d'un labyrinthe, puis d'un éboulement, d'une attaque de vampire etc.
La dépression du riche oisif le fait ressembler un temps au maître de Dirk Bogarde dans The Servant: dont j'espérais que Proutto prendrait le chemin...en vain.
La pauvre soumis, souffre-douleur, m'a aussi rappelé tour à tour la gentillesse et servitude de Rantanplan et la volonté de bien faire du disciple qui subit aussi des horreurs dans la série des BDs Léonard ("de Bob de Groot puis Zidrou").
Mais le tout est bien plus sombre et noir que tout ça et que Alfred Jarry (pourtant déjà noir).
Une parabole qui vire parfois à du gore.
Cet immense abus de faiblesse devient si intense que j'ai coupé ma lecture alors que le texte publié aux éditions Wombat est très court, 74 pages (avec illustrations de Topor).
Même s'il m'est horriblement arrivé d'éclater de rire, notamment au « subterfuge », déguisement et danse page 57, où un personnage en interrompt un autre, saoul chantant à des perroquets choristes!...(scène qui vaut à elle seule la lecture de ce bijou)