Les Abîmes de mon Coeur

Je m'essaye pour peu de temps à la critique de livres. Critique sans spoilers, mais absolument pas objective, vous êtes prévenus.

En fait si je critique ce livre, c'est parce que je le trouve injustement méconnu. Vous allez me dire, la couverture y est sûrement pour quelque chose, on dirait un peu une vieille illustration de la bibliothèque verte.

Mais une fois que vous aurez ouvert ce bouquin, cette illustration vous l'oublierez. Vous l'oublierez car votre attention sera entièrement dédiée aux lignes que vous aurez sous les yeux. Vous serez sur Autremer, vos yeux certes resteront sur terre, mais tout le reste de votre être, sera sur une lointaine planète, en train d'essayer de percer le secret des Abîmes au côté de Sandiane.

Mais ce qui fait la puissance de ce livre, ce n'est pas vraiment son héroïne. Ni son cadre, bien que j'ai vraiment eu l'impression d'avoir fait un séjour sur Autremer. En fait ce qui m'a vraiment transportée, c'est comment j'avais ma place dans ce monde. Presque plus que sur notre bonne vieille Terre. Ce monde faisait de la sensibilité une force, il faisait que les gens sensibles avaient un avantage sur les autres.

Parce que voilà, j'ai toujours considéré ma sensibilité comme une atroce faiblesse. Le fait de s'attacher aux choses, aux gens, d'être ému par une fleur, un paysage, une peinture, une pensée, une mélodie, un contact. Et de se laisser submerger par la colère, ou la peur. Sur Autremer, j'aurais été une fille forte, heureuse et admirée, à la place d'être la fille qui pleure quand elle est en colère.
Mais non seulement c'est grâce à ce livre que j'ai réussi à mettre des mots sur cette étrange mal être que je portais en moi, mais c'est aussi grâce à lui que j'ai cessé de lutter contre cette sensibilité qui me rendait malade.

Ma sensibilité, c'est ma force. Je vois le monde différemment, chaque regard, chaque son, chaque goût, chaque contact, chaque odeur, me submerge, et me rend plus forte. Cette vision différente du monde, on a pas tous la chance de l'avoir. Mais surtout, ne luttez pas contre. Je suis maintenant beaucoup mieux dans ma peau, et je crois que ce livre a été là pile au bon moment dans ma vie. Ma sensibilité a fait de moi quelqu'un d'attentif et d'optimiste.

Et pour ça Danielle Martinigol, merci. Merci de m'avoir aidé à trouver qui je suis, à m'accepter telle que je suis. La fille qui trouve le contact des cendres moins ardent que celui de l'être humain. La fille qui fait une tête bizarre quand elle écoute Schubert. La fille qui pleure quand elle est en colère.

[EDIT : après avoir écrit cette critique, je me suis dit qu'un merci à Danielle Martinigol sur une critique qu'elle ne lira jamais était assez vain. Je lui ai donc envoyé ma critique, et j'ai eu la chance d'obtenir une réponse !! Voici un copié collé pour vous faire partager ma joie :
"Je suis très touchée par votre gentil mél ! merci [mon vrai prénom], un si joli témoignage de l’impact qu’ont eu sur vous mes Abîmes qui me fait énormément plaisir et me conforte dans l’idée que ces romans mériteraient d’exister encore en version papier. Hélas, ce n’est plus le cas. [note de La Flemme à vous qui lisez la critique : ils existent toujours en version numérique]
Je ne sais où vous résidez, mais si jamais je suis sur un salon du livre près de chez vous, je serai ravie de vous rencontrer à une telle occasion. J’annonce sur mon petit site les endroits où je dois me rendre assez longtemps à l’avance.
Encore merci, bien à vous,
Cordialement,
Danielle MARTINIGOL" ]