Entre 1920 et 1940 sont nés les 10 enfants de Henri et Mathilde Bourgeois. Dix enfants qui arrivent tous entre deux événements mondiaux dramatiques. Huit garçons et deux filles : Jules, Jean, Nicolas, Louise, Joseph, Jérôme, Claude, André, Guy et Marie qui traverseront les années et seront à leur tour parents, perpétuant ainsi le nom des Bourgeois.
Alice Ferney procède par petites touches pour nous raconter cette famille qui débute avec Henri et Mathilde. Le socle de l’éducation est le même pour tous mais chacun en fera quelque chose de différent selon ses goûts, ses aspirations, son caractère, son ordre d’arrivée dans la fratrie. Un point commun pourtant entre tous : une conscience ancrée des valeurs familiales et de la bonne éducation.
La famille Bourgeois va ainsi traverser les années, participant aux grands événements qui marquent l’histoire de la France, frappée par des drames ou partageant de grands bonheurs. Le récit alterne les époques, passées et présentes, pour reconstituer le fil de l’histoire familiale et pour en expliquer les fondements. Un peu comme si le lecteur feuilletait l’album de photos de cette famille, pas si atypique à l’époque où elle nait.
C’est passionnant, extrêmement vivant, jamais lassant malgré la multiplicité des personnages, très juste, souvent émouvant.
Alice Ferney creuse le sillon des rapports humains au cœur d’une société particulière, celle de la famille. Elle explore avec maestria ce qui constitue les fondations d’une bourgeoisie traditionnelle attachée à la religion, à l’esprit de famille, à une répartition précise des rôles entre les sexes. Cela raconte une époque mais cela pénètre aussi dans une intimité. Celle de la place qu’occupe chaque enfant au sein d’une fratrie, le rôle qu’il endosse, les incertitudes des souvenirs malgré l’histoire partagée, les interprétations des uns et des autres. D’autant plus quand il existe d’aussi grands écarts d’âge entre les enfants.
Le récit parle aussi, évidemment, d’héritage, de ce qu’on transmet et de ce qu’on conserve de son éducation et bien sûr les répercussions des événements intimes ou les bouleversements historiques ou de société.
Encore une fois, Alice Ferney démontre son grand talent de conteuse. Sans esbroufe mais avec infiniment d’élégance.