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Alfred de Vigny, "la mort du loup" (1838), les Destinées (1864)


Introduction

C'est après une grave crise affective et morale (il a perdu sa mère, rompu avec l'actrice Marie Dorval et tous ses amis parisiens, il se retrouve seul à Charente) que Vigny a écrit en 1838, en une nuit et une partie du jour suivant le poème intitulé "la mort du loup" paru dans le recueil posthume les Destinées en 1864. Ce long poème en alexandrin à rime plate décrit une chasse nocturne qui se termine par la mort héroïque du loup suivi d'une réflexion morale sur le sens de la vie.
Nous étudierons le réalisme mêlé de fantastique du décor et de l'action puis la valeur symbolique de l'apologue (à travers la figure du loup, les sentiments du poète et la réflexion qui suit le récit)


Le récit de la mort du loup

Aspect réaliste du récit des lieux, Vigny a déjà participé à une chasse.
Vers 1-16 : le décor : scène de chasse nocturne avec combinaison de couleur (rouge et noir) sinistre et inquiétant de la chasse. Impression fantastique avec la Lune enflammée.
Lieux réalistes avec l'humide gazon dû à la rosée de la nuit. Evocation de la Nature dans la chasse. La Nature est hostile (présence de connotation négative) et est personnifié (vers 10-11) qui marque un arrêt. Le rythme marque les arrêts des chasseurs, tous leurs sens en arrêts.
Comparaison des chênes à des êtres impressionnants (géants) que rien ne les perturbe.
Métaphore de la girouette (vers 12) qui souffre d'une mort à venir : traduction des angoisses des chasseurs de la peur de la mort. La girouette prédit peut-être la mort prochaine du loup.
Vers 17-26 : attitude des chasseurs : Ce sont des chasseurs expérimentés. Traquer : encercler les animaux pour les fermer tout issue de fuite. Scène réaliste (vers 20) qui montre le réalisme des chasseurs. Ils savent qu'ils auront à affronter deux loups et deux louveteaux.
C'est un récit rigoureux, ils ne sautent aucune étape. Il y a la présence d'une marque d'intervalle qui montre que c'est une étape décisive (le poète n'est pas le premier à avoir trouvé ce loup, on a l'impression qu'il est inexpérimenté)
Vers 27-40 : découverte de la famille du loup
Marque fantastique avec "les yeux qui flamboient" (vers 28), avec les danses des louveteaux multipliés par les ombres (vers 30). Rythme et sonorité doux : les louveteaux sont joyeux, mais leurs instincts leurs conseillent de rester sur leurs gardes. L'ennemi héréditaire des loups est l'homme (vers 35-16) et la lutte semble être inévitable. Les loups ont une noble attitude, les louveteaux et la mère ont une entière confiance au loup.
Vers 40-60 : personnification du loup avec la présence des jambes au lieu des pattes (vers 41). Idéalisation du loup contrairement aux chasseurs.
Scène réaliste : "ongles crochus dans le sable enfoncées" (vers 42) : cela montre que le loup est déterminé à ne pas reculer face aux chasseurs. Projection face à l'avenir (vers 43) : il comprend qu'il n'a plus rien à faire, transposition du raisonnement de l'homme à l'animal. Il décide de mourir avec gloire. Fierté du loup qui ne manque pas de courage. Le loup prend vite sa décision (vers 45 : "alors").
Les vers 45-52 montrent le dernier exploit du loup. Le loup décide de s'attaquer à un chien et il ne cède pas. Le loup ne reconnaît pas le chasseur comme un digne adversaire (le chien était comparé au loup au début de la poésie)
Description réaliste et cruelle : ce n'est pas la cruauté du loup qui sort, mais sa fierté et sa gloire, il n'abdique pas sachant que l'issu sera fatal.
Les yeux ont une grande importance : le regard du loup traduit ce qu'il ressent à l'égard des chasseurs.
Daigner : hauteur de dignité hautaine, mépris contre les hommes. Il les considère comme des bourreaux. Il meurt sans se plaindre.
L'apologue apparaît lors de la mort du loup : le loup assimilé à l'homme de génie qui a accepte sa mort sans se plaindre, attitude qui laisse penser que la lutte est inégale.


La fin du récit, jugement (sentiment) du poète

Implication personnel du poète qui se désolidarise et se démarque des chasseurs : les chasseurs vont continuer à poursuivre les loups qui se sont enfuient lorsque la louve a compris qu'il n'y avait rien à faire. Le devoir de mère du loup est plus fort que le lien qui la lie avec le loup. Commencement d'une réflexion philosophique (vers 69) : le pacte des villes : concession faite à la société qui nous conduit à être différent de ce que l'on est véritablement (Vigny quitte Paris et retourne dans son château).
Les chiens ne sont pas des animaux nobles, ils sont guidés par leurs instincts et besoin matériel comme les hommes, ils sont obligés de se soumettre aux hommes pour avoir des faveurs.
(vers 72) : la forêt leur appartient le droit. L'injustice des chasseurs qui abusent de leurs matériels pour tuer les loups dans les forêts. Amertume de Vigny : la société rend les hommes pas vrais. La Nature fait des animaux des êtres nobles et fières. Sentiment de culpabilité : il a participé à la mort du loup. Refus du poète de chasser les loups qui sont légitimement les propriétaires de ces bois (vers 72)


La leçon à en tirer

Sentiment défavorable des hommes (extension du vers 72-76) "j'ai honte de vous".
Interjection : Hélas : regret et pitié, sublimation des hommes oppositions aux loups. Les hommes sont cruels et lâches.
"Débiles" : l'homme ne se sert pas suffisamment de sa Raison. "Nous" : il s'inclus dans les débiles, il a les mêmes défauts que ses congénères.
(vers 75-77) : morale avec admiration des loups et indignation des hommes.
Le loup meurt sans crier / les hommes crient lorsqu'ils ont un malheur, un désagrément.
Vision pessimiste : sincérité de ce qu'il a fait, il va souffrir sans les autres, à l'écart de Paris.
Amorce de dialogue : Vigny s'adresse au loup, il prend le regard du loup comme un message personnel/philosophique (stoïque). Il essaie de dominer son chagrin.
L'animal est différent de l'homme qui doit s'armer et se blinder contre les contraintes de la société.
La conclusion est détachée par un blanc.
La Mort du Loup est un poème anti-chrétien. Vigny ne croit pas en Dieu, mais s'il existe, alors il est un chasseur qui persécute l'homme. L'homme doit accomplir quelques chose c'est pour cela qu'il est envoyé sur Terre.
Le Sort : façon de nier l'existence de Dieu.


Conclusion

Vigny joue sur le double registre de l'émotion et de la raison pour nous faire part d'une conception très élevée de la vie. Le poème en effet, à travers l'idéalisation du loup, la compassion et l'admiration exprimé par le poète, traduit sa volonté de dominer la douleur et de donner un sens à sa vie, selon une morale stoïcienne. Comme le loup, l'homme de génie ne peut-être qu'un solitaire qui accepte son sort sans se plaindre après avoir accompli au mieux la tâche qui lui a été attribué. Le refuge n'est pas en Dieu mais en soi-même (on peut dire aussi que cet apologue est une condamnation de la société qui asservit). Le poète a se perçoit comme un animal traqué qui pour rester libre, doit s'isoler et s'élever par un silence stoïque au-dessus de la fatalité, de la souffrance et de la mort.
Noé_Faleh
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le 18 déc. 2014

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Noé Faleh

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