De livre en livre, Sandrine Collette s’écarte du thriller pour aller de plus en plus dans le roman noir. Elle creuse les atmosphères, creuse ses personnages, creuse dans les émotions du lecteur.
Ici, d’abord, on suit Moe. Elle a quitté Papeete pour suivre un homme, elle rêvait d’un destin non tracé, de Paris, d’émancipation. Mais Rodolphe l’enterre dans une maison du fin fond de la province, la bat quand il est trop saoul…
Lorsqu’enfin elle s’enfuit, c’est presque impulsivement.
Très vite c’est la rue.
Puis La Casse, un lieu où ceux qui n’ont plus rien se retrouvent enfermés, isolés, à dormir dans des épaves et à survivre sans grand espoir d’en sortir un jour.
Sandrine Collette situe son livre dans un futur pas très lointain, pas improbable. Un monde dur.
Mais un monde où quand même, l’espoir et la solidarité sont possibles.
Moe est installée dans un « quartier » occupé par cinq autres femmes. Cinq femmes qui font bloc, survivent, filent droit. Et Moe, avec son tout petit bébé, s’intègre à ce groupe.
Les larmes noires sur la terre, est un roman noir et lumineux. Ce groupe de femmes est fabuleux, elles sont belles, intenses, écorchées, solidaires, des gueules cassées. Cinq personnages auxquels le lecteur s’accroche, se tient. A s’asseoir autour du feu et écouter leurs histoires.
Le quotidien à La Casse, ça ressemble à un quotidien dans une prison : le travail qui rapporte des clopinettes, les trafics en fourbe, le marché noir, la prostitution, la guérisseuse parce que les secours mettent toujours trop de temps. Le quotidien des cinq femmes connaîtra plein de rebondissements, des moments d’une tension parfois insoutenable pour le lecteur. On a peur, souvent, pour elles. Ce n’est pas possible qu’une telle pureté existe dans cette crasse…
L’écriture de Collette est toujours tranchante, précise, mais trouve aussi un angle plus rond où se dessine des émotions douces.