Au-delà de l'histoire (plaisante, aux enjeux réduits mais pas dénuée d'originalité), du système de jeu (fouillé sans être fouillis, encore à ce jour l'un des plus solides du genre) et de l'univers (relativement classique, mais magnifié par les illustrations d'un Gary Chalk trop souvent décrié), ce livre-jeu réussit un tour de force rare dans le genre : aucun paragraphe n'est un passage obligatoire, hormis le tout premier et le tout dernier. Non, vraiment, aucun. Allez-y, vérifiez.
Cette absence remarquable de dirigisme donne lieu à une aventure qu'on pourra souvent relire avec un œil neuf, sans avoir à craindre sans cesse de voir son héros mourir au paragraphe inconnu suivant. Ironie du sort, Joe Dever n'a jamais réellement produit de livre dans la même veine, la suite de la série voyant un Loup Solitaire de plus en plus dopé aux hormones sauver le monde toutes les semaines au fil d'aventures plus linéaires qu'un double décimètre.
Il faudrait davantage saluer le travail des traducteurs (ici, Camille Fabien), qui apportaient souvent une dimension littéraire bienvenue aux livres-jeux qui passaient entre leurs mains : sans cracher sur les sieurs Jackson, Dever et al., on sent bien en les lisant dans le texte qu'ils étaient avant tout des rôlistes et seulement ensuite des écrivains. Un gros point noir cependant : le titre, ce Les Maîtres des Ténèbres d'une platitude et d'un ridicule achevés comparé au dynamique Flight from the Dark original.