Les statues d'une jeunesse qui se fane et se déroule de saison en saison, sur les douze mois de l'année, et les plafonniers de la mort, que la vieille narratrice aperçoit désormais de trop près et contemple sans interruption, poussent celle-ci à l'inventaire et aux portraits de ce et ceux qu'elle ne veut pas voir disparaître dans l'oubli. Tout est prétexte à se rappeler, nom après nom, objet après objet, sans se soucier des répétitions, usées à l'excès, comme une petite vieille raconte encore et et encore par simple besoin de raconter. Hommage contemplatif, inventaire poétique aux portes de la mort, et même derrière ces portes, il s'agit, comme un historien, de cartographier la ville fantôme et ses habitants.
En dépit d'une découpe calamiteuse des phrases qu'aucun théâtreux ne saurait lire sans les ponctuer par ses propres outils, le charme opère lentement, insidieusement, et on ne peut que se laisser emporter par le vide que quelques mots savent si bien remplir, et se souvenir nous-même du temps perdu, que seule la mémoire est encore capable de faire vivre.