Un livre bien construit, bien écrit, qui nous parle d'un temps où "voir quelqu'un" 3 fois par semaine pendant 7 ans était une voie normale, que dis-je, la voie royale d'accès à soi. Marie Cardinal semble avoir été la cliente idéale de la psychanalyse : éducation bourgeoise-catholique névrotisante, capital culturel et capital économique (quand même il lui a fallu, nous dit-elle, travailler pour payer sa cure). J'ai peut-être eu le tort de lire le bouquin comme un document sur une analyse (pour une fois que ce n'est pas le psy qui raconte, en insistant complaisamment sur sa géniale intuition clinique), ce qu'il est finalement assez peu. Ça me semble important de le dire (même si d'autres l'ont déjà fait ici) car les psychanalystes se plaisaient, se plaisent encore à considérer ce que l'autrice s'est bien appliquée à qualifier de roman comme un document. Bref. On lira davantage ici le portrait d'une "folie" (une bonne névrose) qui trouve, effectivement, les mots pour se dire, avec / en même temps que / autour de... la psychanalyse, ce qui n'est pas absolument inintéressant (ce d'autant qu'il y a du style), mais tout de même un brin longuet et fabriqué. Dans le registre, j'ai été bien plus saisi par le Darkness Visible (Face aux ténèbres) de Styron qui est plus sauvage, plus brut de décoffrage, plus authentique à mon sens.