Les Murailles de feu raconte le combat qui opposa de façon asymétrique 300 soldats spartiates et leurs alliés à plus de 10000 guerriers de l'armée perse de Xerxès 1er et ceci afin de bloquer l'accès de la péninsule grecque à ces derniers.
Cet épisode mythique a donné lieu à deux films bien différents, le très classique La Bataille des Thermopyles de Rudolph Maté (que je n'ai pas vu) et le stylisé mais très sanglant 300 de Zack Snyder.
Le livre de Steven Pressfield est réussi précisément là où le film de Snyder achoppait : dans la compréhension et l'attachement des personnages. Là où le film se résume à mettre en scène la fameuse bataille, le livre quant à lui réserve la baston finale pour ses toutes dernières pages et s'emploie, sept chapitres durant à raconter l'histoire et la psychologie des différentes figures rencontrées (les 7 chapitres en question - appelés "livres" portent d'ailleurs chacun le nom d'un des personnages). Car la bataille des Thermopyles loin d'être le fait d'un seul héros est l'exploit de toute une galerie de valeureux soldats qui accompagnèrent leur roi Léonidas dans une mort annoncée : Dienekès, Alexandros, Polynice, Ariston, Suicide, Le Coq, Achide... sont autant de personnalités différentes que nous allons découvrir au fil du récit.
Les choix de narration contribuent fortement à la réussite du livre. Au lieu de raconter lui-même, Pressfield attribue en effet le récit à l'un des personnages, en l’occurrence Xéon, un des rares Lacédémoniens à avoir survécu au massacre et que Xerxès épargne dans le seul but qu'il lui raconte sa version de la bataille. Cette narration décalée est assez efficace car au lieu d'avoir affaire à un style moderne propre à la littérature contemporaine, nous accédons à un récit aux tonalités quelque peu désuètes qui collent parfaitement à l'ancienneté des événements racontés. Un peu comme si nous écoutions un conteur de l'époque tel le grand Homère.
Mais ce n'est pas seulement le style qui marque le lecteur mais également la construction du récit. Car loin de raconter directement la bataille finale, Xéon prend son temps et ménage ses effets en faisant surgir de sa mémoire un par un tous les héros engagés dans la bataille. Xerxès, séduit par la richesse du récit du jeune Xéon, retarde sans cesse la mort de ce dernier afin d'accéder à la suite des aventures. Les Murailles de feu, c'est donc en quelque sorte le principe des Mille et une nuits appliqué à la bataille des Thermopyles. Vous entamez votre lecture en pensant entrer rapidement dans la fameuse bataille et vous vous retrouvez comme le roi perse à écouter les exploits de jeunesse de Léonidas, Dienekès et consorts.
Mais ce timing consacré à faire connaissance avec tous ces héros, avec leurs origines, leur caractère, permet du coup de donner davantage de force à la bataille finale lorsque le récit de celle-ci arrive enfin... et avec elle la perte de tous ces personnages que l'auteur a pris le temps de nous présenter.
Une lecture plaisante à bien des égards.
P.S : Et merci à Ratdebibli pour cette recommandation.