Renouer avec le XIXème

Prix Goncourt 2018, Leurs Enfants après eux ne saurait se résoudre uniquement à ce prix. De par sa beauté stylistique, il le dépasse largement. Nicolas Mathieu nous plonge dans cet été infini au coeur de la vallée de la Henne évoquant des moments bien trop connus de spleen, d'ennui et de petites embrouilles adolescentes. Au sein de cet ennui estival, la découverte de l'amour et de la sexualité s'épanouit et, nous, lecteurs sommes emportés dans les histoires intimes, minuscules, des protagonistes.

En dire plus reviendrait à compromettre la lecture des futurs lecteurs. Avec ce livre, Nicolas Matthieu approfondit son récit de la désindustrialisation, entamé avec Aux Animaux la guerre. Des parents, il étudie désormais les enfants. Et c'est finalement là peut-être le point fort de ce livre.

Ce récit, social et politique, a tout à voir avec les romans du XIXème siècle. L'auteur semble renouer avec ces récits qui, bien qu'anodins, nous font vivre une adolescence heureuse. Bien des similitudes peuvent être faites entre l'écriture de Nicolas Mathieu et Balzac, Sand ou encore même Annie Ernaux : le don pour saisir son temps (Illusions Perdues), la capacité de l'écrire sans en faire un roman dogmatique et lourd (Les Années), la complexité des personnages féminins et masculins (Consuelo), etc. La liste serait bien longue. Pétri de références sans en avoir l'air, ce livre inépuisable a l'effet d'une madeleine. Leurs Enfants après eux renouvelle le roman d'apprentissage par le souci d'une langue aussi bien politique que poétique.