Au feu tous les manuels, tous les cours du soir, et tous les conseils trouvés sur internet : l’une des seules bonnes méthodes pour apprendre comment réaliser un film, c’est ce livre. Pourquoi ? Parce qu’il indique tout ce qu’il ne faut PAS faire en accéléré !

Reprenons : un cinéaste intello (comprendre un prof d’unif spécialisé dans le court métrage) décide de franchir le cap du long en se coltinant un scénario un peu obscur, trop lointain (tournage en Grèce donc coût important) et sans vraiment connaître l’ensemble de son équipe. Le réalisateur met tellement de lui-même qu’il s’enfonce dans une forme d’autisme artistique, chose fréquente mais très mal venue lors d’un tournage. Et c’est là que tout dérape : à cause d’un ingénieur du son teigneux, d’une scripte perturbée et de quelques je m’en-foutistes dans les autres techniciens, le réalisateur perd le contrôle de son tournage, se met des comédiens à dos, se fait voler la réalisation par l’un d’eux, est abandonné par son producteur et se voit contraint de finir le film quitte à sacrifier ses ambitions premières et, même, son intégrité.

Ca a l’air surfait, mais c’est réel : Frédéric Sojcher a été la victime d’un tournage qui se passe mal, comme ça peut arriver parfois, mais multiplié par dix. Si le style d’écriture est ampoulé et peu subtil, le Je de Sojcher s’adressant au Tu de sa compagne de manière malvenue, l’essentiel est là : le récit est limpide, techniquement simplifié le plus souvent et s’avance vers une inexorable fin humiliante pour le film, aujourd’hui introuvable. Honnête quoique parfois de mauvaise foi, Sojcher reconnaît ses faiblesses et les analyse a posteriori, tente de comprendre via cette psychanalyse littéraire comment le rêve de sa vie s’est transformé en cauchemar.

Plus qu’un livre sur le cinéma, Main basse sur le film est un mélodrame où le soleil grec le dispute à l’ombre d’un plateau, portrait de gens parfois frustrés, parfois solidaires, mais toujours sur le fil du rasoir. Et, tel une épée de Damoclès, ce rasoir peut faire de sacré dégâts. Un incontournable.
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le 19 janv. 2014

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