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D'une guerre éternelle entre oppresseurs et opprimés, de vénérables raisonneurs s'imaginèrent trouver - dans la plus haute modestie - l'ultime lutte scellant un avenir paisible et lumineux derrière l'opposition finale du bon prolétariat à la méchante bourgeoisie. Victorieusement remportée par le prolétariat, le début du rêve pourrait commencer dans « une association où le libre développement de chacun est la condition du libre développement pour tous ». Vraiment, nous sommes ravis de l'entendre, nous qui croyions que communisme rimait avec égalitarisme, que l'abolition de la propriété signifiait la dépossession de soi, que la lutte des classes n'était que le fruit conceptuel de quelques malins abstracteurs qui profiteraient d'une opportunité révolutionnaire pour accaparer le pouvoir.
Cet essai fait penser à la parabole de la paille et de la poutre, quand le communisme dit au capitalisme : « Hé ! vois comme tu déshumanises le prolétariat en le réduisant à l'état d'outil, tout cela pour de stériles profits » alors qu'il est d'autant plus évident que le communisme, en souhaitant la destruction de toute hiérarchie, toute propriété, toute compétition, promeut une société composée d'humains entièrement robotisés, dépouillés de leur volonté et leurs passions, travaillant par obligation téléologique. Pis encore quand le communisme appelle « stériles profits » le moteur du développement, il est à comprendre que les partisans du communisme resteront à jamais bloqués avec les mêmes moyens de production puisque tout aura été mis en œuvre pour éteindre le processus créatif.
Cela n'empêchera pas les auteurs d'écrire : « Dans la société bourgeoise, le passé domine le présent ; dans la société communiste, c’est le présent qui dominera le passé. Dans la société bourgeoise, le capital est indépendant et personnel, tandis que l’individu agissant est dépendant et privé de personnalité. » Nous pouvons regretter de n'avoir pas de comparaison pour cette dernière phrase, remarquons toutefois la mauvaise foi des auteurs en ce que le prolétaire, au sein du système capitaliste, ne se trouve dépersonnalisé qu'à l'occasion de son travail. Il retrouve toute l'étendue de son individualité lorsqu'il en sort et il lui appartient par ailleurs de sortir de son état de dépendance par l'entrepreneuriat.
« Vous prétendez encore qu’avec l’abolition de la propriété privée toute activité cesserait, qu’une paresse générale s’emparerait du monde. Si cela était, il y a beau jour que la société bourgeoise serait morte de fainéantise, car ceux qui y travaillent ne gagnent pas, et ceux qui y gagnent ne travaillent pas. » Il eût mieux valu caviarder ce passage plutôt que d'y ajouter pareille absurdité. Quelle âme généreuse pourrait prétendre à expliquer et défendre ce passage ? Il semble raisonnable de se demander pour qui et pour quoi les prolétaires nouvellement affranchis travailleraient.
La réponse, c'est bien sûr l'État ! « Le prolétariat se servira de sa suprématie politique pour arracher graduellement tout capital à la bourgeoisie, pour centraliser tous les instruments de production dans les mains de l’État ». Pourtant, l'État dans l'idéologie communiste n'est qu'une étape intermédiaire avant la mise en place de l'anarchie utopiste. Nous nous interrogeons néanmoins sur la réalité de son application au regard de l'histoire des États communistes dans lesquels les membres politiques, les apparatchiks, concentrent tous les capitaux, formant par là une nouvelle opposition dans la merveilleuse société communiste. La morale, c'est que tant qu'il y aura deux hommes, il y aura toujours un premier et un second. Dès lors, il est convenable de composer avec ces deux individus et faire en sorte que le second d'aujourd'hui soit déjà le premier d'hier.
Nous devons, après cette critique du communisme, lui reconnaitre certains points d'accord avec la logique, science pure de la raison, qui ont certainement participé grandement à l'adhésion idéologique de nombreux membres. Ainsi, le rejet de la tradition à travers les valeurs de famille, la patrie ou encore la religion constitue la plus grande sinon la seule réussite de la pensée communiste. Tous ces concepts traditionnels forment en effet un bouchon, obstruant la diffusion de la raison, qu'il convient de faire sauter. En écho à la destruction de la famille, l'abolition de l'héritage est un élément central à considérer autant dans le système capitaliste en ce qu'il éviterait la formation d'empires maintenus sur plusieurs générations.
Créée
le 31 janv. 2022
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