Lucia Berlin a vécu une existence assez chaotique entre le Mexique et les Etats-Unis. Le sujet de ses nouvelles est souvent elle-même reliée à ses proches, ses collègues de travail ou des gens rencontrés sur le chemin. L’ordre des nouvelles n’étant pas forcément chronologique, le lecteur est amené à retrouver Lucia femme mûre, enfant ou jeune adulte et doit comme se coltiner avec un puzzle pour saisir tenants et aboutissants. Je dois dire que certaines nouvelles m’ont autant intéressé comme d’autres m’ont vraiment laissé indifférent. Ce sentiment de lire un recueil assez inégal dans ses évocations est donc plutôt déroutant. Dans les meilleurs moments du livre, je retiendrai la relation assez perturbée que Lucia Berlin avait avec sa mère car il a conditionné son rapport à la vie ( jusqu’à devenir alcoolique comme elle). Son attachement à des hommes différents avec lesquels furent nés quatre enfants quand même révéla également une capacité particulière à s’adapter à une vie bohème. Le titre du recueil Manuel à l’usage des femmes de ménage est celui d’une des nouvelles quand Lucia Berlin travailla comme femme de ménage et sûrement une des plus riantes. Quelque part, ce format de l’auto fiction sous la forme de nouvelles n’est sûrement pas le plus adapté. Sans être méprisant non plus, on peut constater que l’alcoolisme et la scoliose de l’auteur,contre lesquels elle lutta une bonne partie de sa vie,ne l’ont pas forcément aider à avoir une production littéraire véritablement aboutie. Il faut quand même reconnaître le sacré caractère de cette femme finissant par devenir professeur d’université sur le tard. Un itinéraire non balisé qui lui permit de vivre son existence à contre-courant mais où elle tâcha de rester debout face à l’adversité. Comme quoi, un parcours de vie peut être nettement plus remarquable que la gratification d’une œuvre ( que l’édition tente de réhabiliter bien après le décès de Lucia Berlin).