Pierre Lemaitre clôt sa trilogie en beauté !

Dans ce dernier volet de la trilogie Les enfants du désastre, on retrouve d’abord Louise Belmont, cette gamine que l’on avait découverte aux côtés de la gueule cassée Édouard Péricourt, le personnage central de Au revoir là-haut. Louise, désormais adulte, exerce le métier d’institutrice mais travaille également comme serveuse pour arrondir ses fin de mois à La petite bohème, un bistrot tenu par le bourru mais sympathique Jules. C’est avec elle que tout va démarrer le roman, dans une premier partie qui annonce une histoire plein de mystères et de rebondissements.
À côté de ce personnage clé, on découvre celui de Raoul Landrade, un truand de première classe, soldat dans l’armée française, mobilisé au fort du Mayenberg mais qui passe son temps à faire des affaires, à magouiller à droite à gauche pour son propre intérêt. Un profiteur de guerre. On suivra également les pas de Désiré Migault, un génial usurpateur, une faussaire de talent, un mythomane surdoué capable d’endosser n’importe quel costume et de faire plus qu’illusion quand il s’agit d’exercer, au choix, la fonction d’instituteur, de pilote d’avion, d’avocat, ou encore celle d’agent du ministère de l’information dans laquelle il excelle !


Au départ, ont suit donc en parallèle le destin de ces quelques personnages, de ces drôles de pieds nickelés, mais on imagine évidemment qu’à un moment donné, leurs routes vont finir par se croiser. Et des routes, des chemins, il en bel et bien question dans ce roman, de ces routes de l’exode, qui vont rassembler des milliers de personnes, fuyant la guerre dans une France en plein chaos où chacun avance sans trop savoir vraiment ou aller.


Avec Miroir de nos peines, Pierre Lemaitre clôt sans trilogie en beauté, nous offrant un roman d’une puissance romanesque incroyable, un livre rempli de personnages complexes, pour certains à la fois odieux, généreux, manipulateur, pour lesquels on a bien du mal de se faire une opinion définitive.
Le style de Pierre Lemaitre, toujours aussi alerte, vivant, nous offre des dialogues magnifiques avec des formules dignes parfois des grands dialoguistes du cinéma des années 50, 60 et 70. Car oui, il y a de la gouaille, du verbe, mais surtout de la grande et belle littérature populaire dans ce livre qui se déguste finalement plus qu’il ne se lit.


Dans son registre qui évoquera autant Balzac que Dumas ou Hugo, l’auteur nous dresse un portrait juste, documenté et précis de cette France de 40, racontant avec détail la débâcle, mais aussi la désinformation mise en place par le gouvernement, relatant également, à travers le destin de ses personnages, des faits méconnus de cette période, comme cette étonnante historie de sacs de billets de la banque de France brûles pour éviter que les Allemands ne s’en emparent.


Voila donc un roman feuilletonesque, jubilatoire, drôle, piquant, fourmillant de descriptions et d’impressions, à la hauteur des grands classiques de la littérature française signé par un auteur qui nous raconte un petit bout d’histoire avec passion et générosité, mais sans jamais de prendre au sérieux et avec toujours cette complicité si plaisante avec le lecteur. Un petit chef-d’œuvre !
https://www.benzinemag.net/2020/03/05/miroir-de-nos-peines-pierre-lemaitre-clot-sa-trilogie-en-beaute/

BenoitRichard
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le 5 mars 2020

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Ben Ric

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