Alors, ce troisième volume, lecteur, tu te demandes à juste titre ce qu'il vaut et si tu peux risquer d' investir ton argent de poche dans cet épais roman de 532 pages...
Après Au revoir-là-haut et Couleurs de l'incendie, Pierre Lemaître nous propose le dernier tome de cette « trilogie de l'entre-deux-guerres » : Miroir de nos peines, dont l'intrigue se situe en 1940 entre le 6 avril et le 13 juin, autrement dit, entre la « drôle de guerre » et l'exode…
Les premières pages mettent en scène un cafetier parisien nommé M. Jules qui râle (un cafetier parisien, disais-je…) parce que la guerre ne commence pas, parce qu'une guerre, c'est pas ça et parce que, dit-il en jetant son torchon sur son épaule gauche et sans cesser de râler, le prix du charbon augmente, les quotidiens censurés y'en a marre et le couvre-feu ras-le-bol… C'est pas une vie, quoi !
Dans un recoin de son restaurant « La Petite Bohème », se tient tous les samedis depuis vingt ans un homme silencieux que tout le monde surnomme « le docteur »… Il prend son repas, sourit à Louise qui le sert et repart… Mais ce jour-là, il se penche vers la jeune femme et lui fait une demande pour le moins étrange : accepterait-elle de se dénuder devant lui ? Il ne s'approcherait pas d'elle, non, il la regarderait et c'est tout…
Qui est ce docteur ? Qu'attend-il ? Que veut-il ?
Hé, hé, lecteur, à la quatrième page, te voilà ferré… Parce que ce Pierre Lemaître a incontestablement l'art et la manière de nous saisir, de piquer notre curiosité et de ne pas nous lâcher… Si ce roman était paru en feuilleton, au XIXe, dans un quotidien quelconque, à coup sûr on n'en aurait pas loupé un numéro… Oui, il y a du « roman populaire » dans ce texte (et je ne mets rien de péjoratif dans ce terme)… Des histoires d'amour, des enfants abandonnés, des secrets de famille, des gens qui meurent et qui pleurent, des lettres passionnées, des séparations, des retrouvailles, des rebondissements à gogo… Le tout parfaitement rythmé : pas de temps mort… Un vrai page-turner… Le plaisir de lecture est là, à chaque page, et l'on ne s'en plaint pas !
Bon, le côté mélo est peut-être un peu plus prononcé que dans les deux premiers volumes… Ce n'est pas ce que j'ai préféré mais autant dire que ça marche, on veut connaître la suite, on est humain quoi…En plus, comme tout cela se lit très facilement, on traverse les pages à la vitesse d'un bolide de Formule 1 et c'est délicieux, incontestablement… Pierre Lemaître est doué, pas de discussion là-dessus…
Mais voyez-vous, ce que j'ai préféré se loge ailleurs : dans deux domaines où l'auteur excelle vraiment. 1 : les grandes scènes (qu'on n'oubliera jamais) et il y en a quelques-unes (dont une qui arrive très vite au début du roman… mais chut… - quand je pense que dans une émission de France Culture, ils ont osé la dévoiler… je leur aurais tordu le cou en direct…) Franchement, Lemaître a de l'idée pour créer des situations improbables, complètement inattendues et très cinématographiques…
Il est fort, très fort mais là où il est le meilleur, c'est dans la création de personnages qui portent à mon avis le roman : un certain Raoul Landrade et surtout, surtout et là, je pèse mes mots : un homme hors du commun, ébouriffant, fou ?, inouï, tellement rocambolesque, j'ai nommé (roulements de tambour)... Désiré Migaud…
Alors, rien que pour lui, mes amis, vous pouvez, les yeux fermés, investir 22 euros 90 dans ce roman parce qu'il en vaut la chandelle… Pourquoi ? Ah ah… C'est pareil, faut pas trop en dire… ça gâche et vous m'en voudriez... mais sachez quand même que ce personnage va vous faire hurler de rire (bon j'exagère un peu, c'est vrai, mais pas tant que ça), que vous allez le rencontrer de façon plutôt inattendue et que vraiment, là, on touche à la perfection en terme d'originalité, de mystère et d'invention…
Sacré Désiré, tiens, tu me manques déjà !
Allez à sa rencontre : il est phénoménal et, dans les dernières pages du roman… il touche, disons-le, au sublime…
On en reparlera de celui-là, vous verrez…
Foncez !


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lireaulit
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le 8 mars 2020

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