Titre accrocheur, développement erratique et fin attendue.

"Mort aux cons: vaste programme!" aurait lâché Charles de Gaulle.

C'est aussi ce que je me suis dis spontanément lorsque l'existence de cet ouvrage fut porté à ma connaissance par une mienne amie, en réponse à une chronique au vitriol que j'ai commis et qui racontait mes non-aventures de ma (sur)vie de bureau.

Avec un titre pareil, le livre, même s'il s'avérait mauvais, devrait bien comporter quelques scènes de bravoure propre à satisfaire ma haine des cons. C'est dans cet esprit que j'en ai fait l'acquisition, au format poche et à un prix modique pour ne rien regretter.

La première partie du récit s'ouvre sur les prémices de l'aventure et de la réflexion du héros. Le propos est bien amené et on suit avec délices les premières expériences dont le titre du roman est un écho. Car oui, c'est bien de cela qu'il s'agit: la purge de l'environnement du héros des cons qui lui pourrissent la vie. Ces premiers cons à passer un costume en sapin sont franchement antipathiques et sont des modèles du genre, et les voir disparaître m'a procuré un sentiment étrange de jouissance malsaine et de culpabilité.

Les choses ralentissent dans la seconde partie du récit, ou le héros pose sa réflexion sur le concept de "con" et ou la joyeuse spontanéité avec laquelle il zigouillait des cons d'anthologie fait place à un gloubi-boulga pseudo philosophico-psychologique qui s'étends sur des dizaines et des dizaines et des dizaines de pages. Cette partie est la moins heureuse du livre, et le lecteur erre avec le héros et l'auteur dans un labyrinthe barbant de concepts capilotractés, le tout dans un style littéraire pas franchement brillant. Ce style assez clinique avait quelque chose de décalé dans la première partie, mais il peint en gris le ciel de la morne autoroute qu'emprunte le lecteur sur des centaines de kilomètres et sur laquelle il est parfois difficile de ne pas s'endormir. Le malaise finit même par s'installer tant la définition qu'à le héros du con s'élargit, tant et si bien qu'on se demande si l'on ne serait pas considéré comme un con par le héros, et par l'auteur... Cette seconde partie, qui doit faire 60% du livre, est beaucoup trop longue et au moins une centaines de pages auraient pu nous être épargnées.

La troisième et dernière partie du livre fait passer le roman d'une farce un peu malsaine ou un type zigouille des cons notables à un pensum psychologico-sociologique ou l'on se demande si le héros ne va pas finir par exterminer l'humanité entière, et ou l'auteur laisse libre cour à son habitus anarcho-libertaire qui le rends manifestement allergique à toute espèce de contrainte verticale et à toute transcendance. J'ai personnellement perdu toute espèce de sympathie pour le héros à partir du moment ou j'ai compris qu'il était parfaitement nihiliste, sans structure, sans verticalité, sans faire le moindre effort pour sortir de son petit univers individualiste plat, horizontal et sans relief, c'est à dire qu'il est d'une espèce que j'abhorre et qui est le produit très occidental de nos sociétés d'après guerre.

Cette troisième partie est composée des trois derniers et courts chapitres. Elle apporte un dénouement qui n'est pas vraiment surprenant et que l'on attendait (surtout lorsque l'on est paumé dans les limbes de la seconde partie) mais qui a le mérite de clore proprement le roman qui se termine sur une fin crédible et qui, d'une certaine façon, "remet les choses dans l'ordre" et ou il est permis de douter que le héros a une vision très personnelle de la morale et qu'il vit dans un univers parallèle, ce qui permet enfin au lecteur de se dissocier du propos (écrit à la première personne) du personnage principal pour enfin pouvoir penser autrement. C'est à postériori ce qui m'a le plus plu dans ce roman: la capacité de l'auteur, notamment par le biais de son style simple, descriptif et presque clinique, à emmener le lecteur dans des considérations morales ou il n'aurait jamais mi les pieds tout seul.

Fermer le livre m'a donné l'impression de me réveiller d'un mauvais rêve, de ces rêves qui commencent si bien pour nous plonger dans un univers absurde ou rien n'est droit et ou les perspectives (morales et sociologiques ici) sont entièrement faussées.

CharlesGenge
6
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le 2 juil. 2023

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CharlesGenge

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