Après quatre ans

"J’en suis restée les yeux ouverts, comme en suspension".

Il est des livres qui sont des rencontres, des amis. On les découvre, on les aime, on les perd de vu, on en parle avec nostalgie, avec passion, avec joie. Parfois ils nous aident, nous soutiennent, nous bouleversent. C'est exactement ce que je ressens à chaque relecture de Noces, parfois à des jours, semaines, années d'intervalles. J'y retourne inlassablement, surtout dans les moments de faiblesse.

Il faut savoir que sur mon ordinateur trainent des brouillons, des essais, des instants fugaces à peine travaillés. La nuit est souvent propice à ces flux d'idées, comme ce fut le cas il y a quatre ans, alors que je finissais une énième relecture de Noces. Je vous colle tel quel les pensées qui furent alors les miennes :

"J’en suis restée les yeux ouverts, comme en suspension. J’étais un instant en Algérie, sur une côte aux milles couleurs vives et au souffle chaud, et l’instant d’après j’étais chez moi, les yeux perdus dans l’immensité de la nuit. La sensation était sensiblement la même.

Un battement de cil. J'ai alors touché le passé en une fraction de seconde. Je me revoyais ce soir d’été où j’avais lu ces mêmes pages, et où une fois lues, je m’étais accoudée au bord de la fenêtre, apaisée, face à un ciel en demi-teinte. Le vent venait gentiment me souffler au visage, comme un ami qui me souhaitait la bienvenue. Je n’avais alors plus de peur, plus de crainte, sinon que ce moment ne s’achevât.

Il est des moments comme celui-ci que l’on n’oublie pas. Ils restent gravés au cœur sans aucune marque apparente. Et puis un jour ceux-ci refont surface.

En relisant Noces, j’ai eu l’impression qu’à travers les fines pages de caractères un étranger m’avait chuchoté un secret, ouvert une partie de son jardin ; jardin que je pouvais superposer au mien, sans aucune similarité apparente sinon que cette ode à la nature, à la vie, à la mer. "

De relire ces mots, la douceur des pierres chaudes de Tipasa me réchauffe le coeur et désembrume mon esprit.